Des édifices religieux
Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaireUn des portails de l'église Notre Dame de Pont sur Yonne
Nous sommes arrivés à une époque qui déconstruit, vend, annihile nos églises pour les anéantir en les cassant à coup de bulldozer, ou les transformer en leur contraire, c’est à dire d’un lieu de prières, quand elles sont transformées en hôtels, restaurants, discothèques, cave à vins, lieux de perdition, elles deviennent lieux de l’expression matérialiste dans l’athéisme qui a saisi notre époque et lieu de perversions dans l’expression des plaisirs, du badinage, des paillardises, des débauches.
Comment pouvons-nous accepter que ces édifices deviennent discothèques, restaurants, hôtels ? L'autel devient hôtel, juste un changement de sens par l'homonyme ou homophone ! ou d'autel à une simple table. Personnellement, cela me fait pas mal et à défaut de comprendre, simplement comprendre, que je puisse avoir mal à l'âme.
On désacralise, ce qui en terme ancien signifiait éxécration, mais qui désacralise ? Le Vatican.oui, il faut son accord. Est-ce que le Vatican a autorité en la matière dans la mesure où il n'a de cesse d'amputer le sacré de sa fonction ayant apporté son lot d'athéisme, oui, il faut le dire.
Je ne reconnais donc que le sacré de l'archétypal sans verser dans tous les conciles et décrets de l'église terrestre - les sept collines - pour ne rester que dans le choeur et le coeur de ses monuments en leur pleine signification. Si, pour convenances personnelles, nous acceptons que soient désacralisés les édifices religieux, c'est que nous acceptons l'église terrestre comme valeur s'en nous soucier de l'église spirituelle authentique quand bien même nous serions athés : la pensée matérialiste de Vatican prévaut alors sur le sens spirituel premier de sa mission. En tant que spiritualiste dans sa dimension sacrée, je ne peux pas accepter cette voie de faits.. Si c'est l'Etat qui désacralise parce qu'il en est devenu le propritaire depuis l'époque de la Terreur, je ne le reconnais pas dans la désacralisation des édifices religieux. Je ne lui reconnais pas ce droit.
Guère davantage ne l'accorderait Louis IX sur lequel notre société d'équité, de justice, sociale, administrative, prend pourtant appui et est toujours inconstestée. Plus aujourd'hui .
Considérons un autre aspect qui pourrait être phénomène de modernite si l'on continue en ce sens : imaginons un instant que nous disions pour désacraliser la musique sacrée que "Le Messie" de Haendel ou le " Requiem" de Mozart , c'est du rap, nous ferions exactement la même chose. Allons plus loin, faire croire qu'une plante est un homme ou une rivière, une fleur, vous sentiriez que quelque chose n'est pas à sa place et vous auriez raison.
Allons écouter Haendel qui a davantage sa place en ces édifices que la musique jouée en une discothèque édifiée en nos monuments :
Déconstruction, désacralisation, vente, transformation, affiliation à un autre but. Pourquoi ? Désertification des campagnes, appartenance à l’État lequel n’est pas le clergé qui n’a quasi plus de droit d’entretien, pas de subventions, athéisme croissant, absence de fréquentation, disparition de la foi : Dieu et le Christ sont remplacés par les dieux confort, argent, loisirs, plaisirs, fêtes laïques au sens commercial. La modernité, la science, le vide, sont devenus les nouvelles références. Le vide. Le vide, ce chemin de douleurs qui n’a pas encore dit son dernier mot et qui l’exprime, l’exprimera, en d’autres valeurs. Il faut bien que l’homme se réveille à un moment ! La nature s’en charge. Ses tempêtes, ses grondements, ses éruptions, ses fleuves et rivières sortis de leur lit, ses tremblements de terre devenus si nombreux, ses virus et leurs mutations, sont là pour rappeler la fragilité de l’homme en ses nouveaux motifs établis, et rappeler toutes les illusions et erreurs de la pensée. L'homme orgueilleux croit la maîtriser, elle fait ce qu'elle veut sans prévenir. Exit la science matérialiste dite exacte. Les éléments sont les seuls à voir l’homme à genou, en prière, lorsqu’ils perdent tout de leur confort, oubliant, là encore, que, là, n’est pas le but de la prière et qu’il ne doit pas être la cause de la génuflexion, qu’ils réclament l’éveil en leur source. Ne pas percevoir l'invisible n'est pas la preuve qu'il n'existe pas. La physique quantique, aujourd'hui admise, ne dit-elle pas : le visible est une manifestation de l’Invisible, l’Esprit crée la matière et non l’inverse. Demanderiez-vous au monde aquatique si le terrestre existe qu'il vous répondrait que non si ce monde était doué de la parole. Il ne le voit pas.
Le phénomène n’est pas nouveau ; il existe depuis la transformation de la sainte Chapelle construite par Louis IX qui abritait les saintes reliques, ayant perdu ainsi sa vocation première. Elle n’est donc plus un haut lieu de culte, mais un lieu touristique avec parfois une vocation artistique à type de concerts, aussi de restaurant lorts des réveillons de fin d'année. La musique sacrée s'y exprime toujours et c'est une grâce que les ogives en prière muette reçoivent. Elle était jusqu’à ce moment, le lieu de l’affirmation de la foi que le continent européen entier admirait, portait en dévotion comme témoignage du christianisme dans son expression de louanges et d’un tout début de l’âme de conscience. Pourquoi âme de conscience ? Car celui qui écrivit les mémoires de Louis IX, Jehan Sire de Joinville, fut le premier historien dans l’histoire à relater les faits en utilisant le «Je». Ce «Je» reconnu par tous les historiens de Louis IX affirme que le «Je» épistolaire n’avait pas existé avant Joinville. Il est le premier à le faire. «J’ai vu, j’ai entendu, j’ai senti, j’ai vécu, moi, Joinville, avec mon roi.» (Jacques Le Goff.) Jusqu’à Joinville aucun témoin contemporain n’avait relaté des évènements en son nom propre. Joinville est également le premier à rédiger une explication selon son ressenti au nom de son «Je»: le Credo. La sainte chapelle avait alors une double signification par l’amitié étroite entre le roi et son conseiller, son plus fidèle ami : donner au monde ces reliques en témoignage et apporter le « Je » par la narration de sa nature. Il ne viendrait plus à la pensée d’aucuns de s’exprimer autrement qu’en disant « Je ». C’est en conséquence que la connaissance de l’édification des édifices religieux voit se transformer l’art roman en art gothique, c’est-à-dire la forme des mains jointes pour la prière par l’arc-boutant élevant et soutenant l’ogive que l'art gothique confesse, témoigne, atteste. Si la forme ne fut pas spécialement consciente, elle relate néanmoins l’évolution de l’âme en son esprit-guide, soit son archétype spirituel ayant œuvré pour ces nouvelles formes. L’homme ne fait que se saisir de ce qui existe dans l’esprit de son temps.
- le Credo de Joinville https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k63708063.texteImage -
Qui fait encore le signe de la croix en entrant dans la sainte Chapelle parce qu’elle a été désacralisée ? Qui l’a désacralisée ? Le clergé ou la révolution d’idées ? Le sens n’en est pas le même. Modestement, je dirais moi, parce qu’elles est avant tout un édifice spirituel. Ses ogives parfaites et ses vitraux les ayant épousés sont toujours l’hommage à l’évolution de l’esprit. Cela ne peut être oublié, effacé d’un coup de gomme ni raturé d’un trait violent parce que l’homme a épousé l’athéisme, par choix personnel ou à son insu, dans la modernité rapide qui ne met plus l’homme au centre de sa vie mais en périphérie de son avenir, de son être essentiel.
La sainte chapelle Paris
Quelle est alors la signification de notre temps qui veut déconstruire le passé et en faire table rase pour ne plus nous relier à la conscience de soi ? Il n’est pas question, ici, de se mettre en opposition avec d’autres confessions et autres hommes, mais d’établir l’essentiel de la relation. C'est pourquoi je titre " des édifices religieux" sans faire de différence bien que je parle des édifices chrétiens qui sont les premiers à disparaître d'entre toutes les confessions. Détruirions-nous un temple ou une mosquée ? mais sainte Sophie de Constantinople est devenue mosquée. Je pleure. Non ! Alors pourquoi la chrétienté seule en est-elle la victime en ses églises, chapelles, cathédrales (Notre Dame restera une énigme), abbayes, monastères catholiques ? Posons-nous la question.
Le XIX ième siècle avait reconstruit les églises, abbayes, cathédrales, le XXI ième les vend, les détruit, ou les réoriente vers d'autres buts que le leur. Notre Dame maçonnique ! Le soleil brille pour chacun et ne fait pas de différence entre les hommes dans leurs appartenances. Il les conduit et voudrait que la pensée se saisissent de lui comme témoin de la vie dans nos fois, idées, pensées, êtres. L’ogive gothique est une de ses preuves. Personne ne pourra détruire ces ogives de prières sans affaisser le monument. Des incendies s'y essaient.
Si je regarde l’histoire, je suis force de constater que par la désacralisation première des édifices religieux, récupérés par l’État lors de la révolution française, ne fut qu’un cheminement lent vers leur destruction d’abord physique partielle, têtes scupltées des saints coupées, blanchiment des peintures murales intérieures, puis dans leur sens profond de relation d’âme à âme - religere en latin pour le mot religion, soit relier les hommes entre eux. Force de constater également que l’histoire me rapporte « Sodome et Gomorrhe », lieu de toutes les perversions, et que nous serions dans le renouvellement d’une épreuve identique. Nous ne pouvons pas vouloir des autres le bien en actant son contraire ; nous ne pouvons pas crier à la morale si nous ne l’appliquons pas soi-même. Or, c’est ce que nous voyons aujourd’hui : l’autre dans ses uniques défauts et pas soi dans les nôtres au lieu de voir l'autre beau et bon parce que je me suis pensé tel que je suis grâce à la force de l'esprit conquis en soi à force de travail et de foi. A mon sens propre, nous ne pouvons pas nous plaindre de l'absence croissante de l'immoralité si nous acceptons que soit détruit ce qui l'a précédée, en a été le fondement. Tout va ensemble. De fil en aiguille, disons-nous. Toujours à mon sens propre, si je peux restituer l'âme dans les yeux que je dessine, c'est que l'âme en son esprit existe, sinon, je ne le pourrais pas. Je donne en clair à regarder ce qui existe en l'autre. L'âme c'est l'église intérieure de l'être que les temps ont donné à voir en nos édifices. Elle est "la chambre intérieure" que chacun possède en propre et qui ne peut appartenir à nul autre. Je suis donc bien témoin de l'esprit en soi que je traduis.
Le courage d’être soi
Si j’ai le courage d’être soi, et chacun ne peut être un soi que pour lui-même et personne d’autre pour lui, nous sommes alors convaincus que l’action d’aller contre ces destructions est réellement un courage pris en soi pour l’esprit. Pourquoi ? Car si je pense les évènements, je comprends que par mon âme de sensation, celle qui a des émotions, celle qui reçoit les impressions du monde, et en ai conscience, je suis obligée de penser ces émotions dans leurs causes et de les transformer dans ce qui est mon âme d’entendement – je comprends, ou commence à comprendre – pour parachever dans l’âme de conscience, celle qui a élaboré la compréhension de la cause et qui dans la vérité ne peut plus être contournée. Si nous restons dans l’âme de sensation, que comprenons-nous des causes qui nous ont mis en joie ou en colère ?
Ayant donc pensé l’édifice religieux en sa conception archétypale, créatif, pour devenir réalité physique, incarnée en le monde, car avant que quelque chose existe physiquement, il nous faut le concevoir, le penser, le dessiner, le structurer, j’admets avec facilité que ce que nous a offert l’histoire en ces civilisations antérieures et dans ces faits, a bien pensé en moi en un acte de volonté. L'Esprit parle en soi avant que nous puissions faire. Je ressens en moi et en conséquence la nécessité de perdurer de ces édifices.
Nous ne pouvons pas balayer ce que fut la conscience de nos ancêtres si nous regardons leur conscience. La conscience est vérité et exclue son contraire : l'inconscient. Elle exclue en conséquence le doute. Nous pouvons nous demander si la conscience comporte une conscience dans la mesure ou elle diffère de l'un à l'autre, et nous pouvons répondre que oui, car la conscience entière se fait de petits pas en sauts avant d'être pleine, explicitant que chacun ne soit pas au même degré de conscience en admettant le doute ou exigeant l'adhésion à l'idée d'un autre sans vouloir observer ce qu'est celle de l'autre. Dans ce cas, la conscience n'est qu'un mensonge, une illusion, car elle ne peut être et ne pas être. La conscience aboutie est forcément identique à celle de mon voisin ayant fait le même chemin d'intériorisation en sortant de la seule idée pour penser.
N’est-ce pas là la mission première des architectes, par exemple, pour bâtir nos maisons ? Ils les ont pensées, dessinées, avant qu’elles ne soient nos résidences, eux-même réceptacles de la forme à leur insu. C’est donc bien la preuve que tout est archétypal. Ils sont la conscience de nos besoins dans nos demeures. Demain, nous ne pourrons pas nier cette réalité de nos besoins parce qu’ils ont été au passé l’évidence de ceux-ci. Mais, là, nous ne tenons compte que de nos besoins primaires dits de base, et non de nos besoins spirituels, pourtant l’homme est fait de tous ces besoins et si il en a oublié le besoin spirituel, il n’en garde pas moins le besoin de reconnaissance si cher à notre temps, lequel besoin est la base du «Je». Reculerions-nous en reléguant au passé le besoin spirituel pourtant encore manifesté par un grand nombre ?
"Michaël" de Liane Collot d'Herbois
C’est donc pour ce besoin que nous ne pouvons pas nier, renier, chez l’autre, que le courage d’être soi dans la défense des acquis est primordial pour combattre ce qui voudrait être anéanti, et veulent progresser en beau et en bien dans la valeur de l’amour de tout ce que nous percevons et qui existe à l’infini. C’est sur cette note de l’essentiel en soi que je conclurai l’indispensable respect envers les convictions de chacun quand bien même d’autres les refusent pour ne plus se penser qu’en individu de plaisir (âme de sensation n’ayant pas encore élaboré l’âme d’entendement ni de conscience), et de conception uniquement physique.
Les édifices religieux chrétiens dans leur transformation matérialistes ne sont donc plus au service de l’esprit et de la pensée qui se pense dans la foi et la réalisation de l’homme, mais bien d’une évolution qui veut anéantir ce christianisme encore vivant en bon nombre d’âmes. Certes, nous pouvons prier en soi, soit dans « notre chambre », c’est à dire notre âme, sans témoins, mais nous ne pouvons pas refuser ni nier le besoin de se relier ( religere) à d’autres hommes en les supprimant dans ce qui fut leur archétype de pensée.
"Je" " ich" de Rudolf Steiner