Béatrice Lukomski-Joly


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La colombe et le corbeau

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

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Il était une fois une colombe et un corbeau. Le corbeau avait grands biens et plusieurs niches en ses murs et la colombe n’avait qu’un arbre fleuri pour se poser. Le corbeau aimait agacer la colombe et tournait sans cesse autour de l’arbre où se reposait l’oiseau blanc. Il avait en vue de prendre l’arbre qui avait une roseraie pour amie et d’agrandir son domaine. Il pensait que la roseraie pouvait lui appartenir également. Pour ce but, il volait sans répit autour de l’arbre. La colombe ne bougeait pas. Elle n’avait que faire du corbeau qu’elle trouvait bien laid dans ses vœux et ses actes. Elle le regardait tournoyer autour de l’arbre fleuri de roses, paisible, mais ne doutant jamais qu’un coup de bec du corbeau pouvait détruire ses ailes. Le corbeau avait appelé en renfort les corbeaux de son lignage alors que la colombe était seule en ce lieu. Tous attaquaient la colombe en sa roseraie. Les corbeaux sont foison ; les colombes sont rares.

Le corbeau croassait fort et parfois imitait le roucoulement de la colombe. C’est un mimétisme que possèdent tous les corbeaux. La nature l’avait doté de ce pouvoir alors qu’elle n’avait donné à la colombe que le pouvoir de roucouler. Injustice dirons-nous, mais c’est ainsi que la nature est faite. Nous pouvions nous demander si dans cette capacité à imiter, la création n’avait pas voulu signifier qu’un oiseau noir pouvait ressembler aux hommes néfastes et par là, s’en méfier.

Le corbeau était tout juste sorti du nid et savait déjà imiter les attitudes apprises par ses pairs. La colombe ne ressemblait qu’à elle-même, unique parce que pure en son intelligence d’oiseau blanc.

Jours et nuits, il épiait l’arbre et la roseraie. Un jour, il agressa avec un de ses semblables une branche fleurie. Les griffes acérées balafrèrent le bel arbre. La branche tomba. La colombe gémit. Le corbeau revint à l’attaque. Il renversa l’abreuvoir d’eau pour que la colombe ne put plus boire ni se laver. La colombe alla à la rivière pour boire et se laver, loin de tous regards, pour que sa pureté demeure. Le corbeau ne l’ignorait pas et fut satisfait. Le corbeau vit un chien se promener dans la roseraie. Il lui donna un coup de bec, comme à son habitude, et envoya le chien dans un refuge. Il fit de même avec tout ce qui se promenait dans la roseraie, amis de la colombe. Il la  toisa et et lui dit : Le béton siérait mieux à cet endroit, je m’en fais le garant. Il dit encore : Ici vivent des gens sales et malotrus, en parlant de la colombe et du peuple des oiseaux. La colombe appela le peuple des moineaux et demanda à ce que cette infamie soit mise sur le compte de ses actes et paroles malveillants. Ce fut acté. Le corbeau ne lâcha pas prise. Il y avait un mur près de l’arbre. Il décida de le détruire à coups de becs et de griffes, et d’agrandir, ainsi, son territoire. Le mur gémissait au sol. Il fit venir un ouvrier qui se servit des pierres pour bétonner sa cour. Le corbeau put ainsi entrer chez la colombe. Et ne s’en privait pas. Nul ne le voyait.

Hors de son domaine, il avait curieusement bonne réputation car, avec ses amis sombres plumés, il embauchait corbeaux et corneilles de la campagne pour s’enrichir. Lorsqu’il croassait, il exigeait que la colombe point de bruit ne fasse, point ne se montre. Son chant lui était insupportable. Les oiseaux de la roseraie pleuraient, car il avait aussi volé une carabine dans un champ voisin et d’un coup tiré, sans que nul ne s'en aperçoive, il tua un pigeon qui volait au dessus de ses nids. Il s’attaquait inlassablement au peuple des tourterelles nouvellement arrivé qui veillait sur le lieu. Le corbeau travaillait dur à ses niches, les embellissait avec des moyens dont nul ne savait d’où ils provenaient et payait ses congénères avec des plumes noires mais, laissant croire d’une belle écriture, que la plume noire était une plume blanche cachée sous son ventre, il paradait, or chacun sait qu’aucun corbeau n’a de plumes blanches sur le ventre.

Le peuple des oiseaux nichait dans une haie de thuyas plantée près de ses alcôves ténébreuses. Ils chantaient si fort que les matins heureux louaient les rouge-gorges,  les mésanges, les moineaux, les rouge-queux, les merles, les pigeons et la colombe dans son arbre. Un jour les oiseaux tinrent conseil. Les pigeons décidèrent de salir les niches pour que le corbeau comprenne que la laideur n’est pas de l’âme pure. Plus personne ne vint voir l'oiseau noir. Il s’en alla un temps pour trouver refuge ailleurs. Son oeuvre n'était qu'une  grande faillite. A force d'acculer la colombe, il avait tout perdu. Ses mangeoires délaissées s'abîmèrent. L'une de ses niches s'écroula, preuve que l'on peut vouloir déloger une colombe, la vie vient en aide au bel oiseau affublé de tristesse.  Il décida de revenir chez lui et d’embellir à nouveau son bien, clamant au peuple des oiseaux et à la colombe qu’il avait changé et qu’il avait compris la leçon, qu’il serait désormais leur ami. Mais le corbeau reste un corbeau, sombre et envieux, inquisiteur et épiant la mort. Il redevint lui-même et décida de tuer la colombe puisque telle était sa nature. Le peuple des oiseaux pendant son absence s’était multiplié dans le jardin. Ils avaient connu la paix et dans leur sérénité construit leurs nids. Le corbeau ressortit sa carabine trouvée dans un champ. Il avait appris à la manier comme tous les corbeaux font pour se nourrir de cadavres. Voyant parfois un des leurs gémir au sol, un autre agonir avant de rendre l’âme, le conseil des oiseaux se réunit une nouvelle fois. La colombe écoutait. Les moineaux en plus grand nombre dirent : il nous faut déménager de cette haie car la haie va périr, ainsi sera juste la sentence. Le corbeau comprendra que sa laideur n’a d’égal que la mort de ses arbustes proche de ses niches.

Il nous faut nous en aller, dirent les oiseaux. La colombe approuva, tout en étant triste, car elle serait seule en son arbre, sans plus avoir d’oiseaux près d’elle si la haie venait à mourir. Le corbeau avait entendu cela et ne comprit pas leur intention. Il dit : pourquoi devraient-ils partir, je ne pourrais plus jouer avec la mort, mais je veux bien raccourcir les branches pour que la plupart quitte cette demeure que je n’aime pas, salissant la mienne. Au diable la roseraie ! Alors, il vint sur l’arbre de l'oiseau blanc, visita son jardin. La colombe le poussa dehors, lui affirmant que son arbre était sien et que nul ne la délogerait par la volonté démoniaque d’un corbeau mal- embouché.

Le jardin des oiseaux était si beau que la colombe aimait y vivre. Le jardin du corbeau était devenu un vaste plan bétonné dont la mémoire des pierres du mur abbattu racontait encore qu'elles n'étaient pas de ce lieu. Il croyait que nul n'avait compris mais beaucoup se souvenait  qu'avant d'y avoir une terrasse bétonnée, il y avait eu là un mur fait des même pierres. La vie est juste et la mémoire des uns et des autres est intacte. Nul ne lui disait  que la situation était claire. Le corbeau s'illusionnait et la colombe observait. lI aimait cela. Il trouvait beau la laideur. Deux mondes différents se côtoyaient. Le corbeau fit venir un jardinier qui élaguerait sa haie en plein hiver. La colombe comprit que là était le signe attendu du dépérissement du massif et du départ de ses amis pour une autre maison. La colombe resta chez elle. Elle regarda le jardinier tailler la haie en plein janvier. Le jardinier n’avait pas nettoyé ses outils avant d’œuvrer. Il apporta aux résineux une foule de parasites nichés en ses lames. Les oiseaux virent cela. La colombe sut que le signe attendu était là.. Elle le dit aux oiseaux qui commencèrent à déménager. Elle, occupait toujours son arbre et son jardin fleuri. Le corbeau ne sut pas, pas plus qu’il ne vit, que sa haie avait commencé à dépérir. Les branches commencèrent à roussir, symptôme d’une défaillance engagée. Bientôt le massif n’existerait plus.

La colombe était âgée. Ses pattes la portaient désormais difficilement. Elle tombait  de plus en plus souvent de sa branche, fragilisée par l'âge et les actes des oiseaux noirs. Le corbeau était jeune. Il était dans l'espérance d'avoir un jour gain de cause. La colombe, à force de le subir, commençait à sentir la défaillance de son coeur. Elle volait de moins en moins souvent. Le peuple des oiseaux continuait à chanter pour lui donner courage et la roseraie devenait de plus en plus belle pour émerveiller son regard. Le corbeau continuait de nettoyer ses niches, toujours avide, toujours utilisant ses plumes noires pour qui voulait l'aider sans plumes blanches à offrir. Il attendait que la colombe meurt d'épuisement pour, enfin, qu'elle libère ce jardin et cet arbre qu'il voulait toujours abattre. 

Si un jour vous passez près de cet Eden et que vous entendez dire que sa colombe est  décédée, pensez au corbeau qui n'aura eu de répit dans sa nature propre à détruire. 

Les oiseaux se réunirent une dernière fois voyant leur foyer rougir aux brindilles cramoisies.

« Bien ! Il nous reste encore deux à trois ans avant que cette haie ne soit disparue, et au corbeau de comprendre qu’il peut continuer à faire le mal qu’il ne lui sera pas donné de temps pour réaliser que la malveillance le le condamnera. On ne peut vouloir tout tuer de son environnement sans que la sagesse  n'oublie cet affront." La colombe décida de rester en son jardin et d’attendre le retour des oiseaux quand le corbeau serait défait, quand   sa propre mort pointera la fin de son chant.

C’est ainsi que la sagesse œuvre pour que le mal se transforme. Le corbeau pourra revenir s’apitoyer, disant qu’il a à nouveau compris la leçon, que le peuple des oiseaux n’en croira rien, la nature du corbeau n’étant pas de changer. Ainsi partira-t-il car son départ et sa misère sont écrits dans le livre du monde. Le temps est donné aux colombes paisibles et bienveillantes alors que celui des corbeaux est toujours mesuré. 

 

 

Blanche

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

Blanche est partie en septembre

laissant vide son trône de novembre

sans avoir su qu’elle était Blanche

car née d’une ancienne branche.

 

La noblesse sacrifiée avec ses privilèges,

pourtant profondément liée à son siège,

sa nouvelle chaire entourée de deux,

elle n’a pas vu l’ancien sceptre des adieux.

 

Sans plus de monarchie, mais de règne élu,

elle a pu unir les gueux aux Preux invaincus,

souvent leurs intimant de partir sans vaillance,

car née d’une récente nouvelle alliance.

 

Du visage, les traits identiques, elle était nue.

De sa personnalité de fer, elle était revenue.

Aujourd’hui épousant son ciel sans foi

alors que de foi elle avait vécu de son roi.

 

Blanche est morte pour la seconde fois.

Avant de Castille, bourguignonne en ses lois,

Gouverner est ardu quand née simple élue.

Sans père sur le trône ni fils Saint Élu.

 

Sur le parvis, les gueux refluent sans ombrage,

et de la cathédrale, revoient le beau mariage

qui n’a laissé aucun souvenir en sa mémoire,

car elle ne sut pas qu’elle était Blanche.

 

Son adoré fils en cette vie, elle n'a jamais revu,

car lui avait choisi les gueux pour revivre in-situ,

sans qu'elle ne sache qu'il était de proximité,

Non loin d'elle, la regardant de l'avenir au passé.

 

 

24 septembre 2022

La rencontre

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

C’était un dimanche, par une chaude journée de printemps, que nous pouvions voir se promener un homme, les mains croisées dans le dos. Il semblait attendre quelqu’un, sans attendre vraiment, car il regardait le cours de la rivière au niveau de l’écluse ouverte qui laisserait une péniche passer. Le ciel était haut tout en étant en lui, comme indivisible de sa clarté en son regard qui le reflétait aussi large que profond. Sous la lumière puissante de midi, il semblait invisible par moment, comme disparaissant à cause de trop de clarté diffusée à cette heure. Parfois, on le voyait se retourner et s’accroupir près d’une fleur à laquelle il semblait raconter son instant pour l’éphémère d’une floraison venue trop tôt, comme pour ralentir le saut qu’elle devait faire pour se faner. On le voyait se relever lentement et, sans comprendre son mouvement, nous pouvions apercevoir qu’il était déjà à scruter la coulée émergeant du déverrouillage de l’écluse, sans l’avoir vu se retourner. On le voyait encore lever un doigt comme si, sans lui, l’écluse ne pouvait laisser passer le bateau, et que son geste était le processus fondamental pour cette ouverture. Personne ne le regardait vraiment tant il était présent dans son absence physique qu’on ne pouvait que le deviner. Puis, un oiseau venait à se poser sur son épaule, un autre en sa main, et encore un à ses pieds. Il les saluait après avoir écouté leur chant pour les laisser repartir comme ils étaient venus. Des promeneurs allaient, le frôlant d’un pan de leur veste, inconscients de sa compagnie. Il semblait être âgé, les cheveux blancs, tout en arborant une jeunesse et une force puissantes.

Alors que badauds passaient à côté de lui sans le voir, trop absorbés par leurs pensées se souciant de leur quotidien davantage que de sa présence, elle le vit, lui chuchotant un bonjour d’une voix timide, puis retourna à sa contemplation sur les images que la dentelle de l’écume donnait à voir. Ils voyaient chacun les mêmes tableaux dans cette eau dansant dans leur espace réfléchi par le soleil. Longtemps, ils ne se parlèrent pas, unis tous deux au mouvement de l’eau. Un rayon de soleil vint à coiffer la chevelure et les yeux de l’homme, puis se posa de la même manière sur le regard et la chevelure de la dame. Elle le regarda, sembla le reconnaître sans se souvenir pour autant de l’endroit et du moment ou elle avait pu déjà le rencontrer. Lui, il savait ; il se souvenait mais n’en disait rien. Elle vit ses yeux semblables à l’étincelance d’un diamant. Ses yeux à elle étaient d’une profonde tranquillité qu’elle avait rarement connue, encore opaques d’une vie aussi lourde que pénétrante et, pourtant, déjà transformés par le rayonnement solaire. Ce fut le baiser du rayon à leurs âmes qui éveilla le moment de leur rencontre. Il se tourna, la regardant fixement d’un regard doux, en baissant les paupières, parfois, pour ne pas l’effrayer et dit :

- Nous nous connaissons, vous et moi.

- Je connais votre visage, répondit-elle, mais je ne me souviens pas où j’ai pu vous rencontrer.

- C’était il y a longtemps, Madame. Il doit y avoir quatorze ans écoulés depuis cette  rencontre. Je suis venu vers vous et je vous ai proposé mon aide sans que vous n’y ayez répondu. Vous souvenez-vous ?

Elle ne se souvenait pas. Quelqu’un était venu lui offrir de l’aide sans qu’elle n’ait relevé ni accepté, et pour quelle raison ?

- Non ! Vraiment ! Je ne me souviens pas, dit-elle. Je me souviens seulement de vos traits.

- Puis-je vous aider à vous souvenir ? demanda-t-il. Voyez le mouvement de l’eau, il n’est jamais semblable au précédent et pourtant il porte la mémoire de tous ses mouvements. C’est ainsi que je suis venu vers vous, comme le geste de l’eau qui a baigné mes pieds et vient d’épouser les vôtres. C’est pourquoi, je vous ai trouvée, attendant cette nouvelle heure qu’il y a longtemps, vous n’avez pas vue, tellement ancrée dans votre quotidien, ajouta-t-il, et pourtant, à cette époque, je voulais entrer en relation avec vous.

- Je crains que ce ne soit une énigme, Monsieur, car vraiment ma mémoire n’a pas enregistré votre signe.

- Puis-je vous donner quelques détails qui vous aideront ? Car je suis certain que votre souvenir est aussi présent que l’eau jaillissante en face de nous, affirma notre visiteur sur le saut de ces quatorze années réalisées.

- J’accepte quelques confidences sur ce passé oublié, dit-elle. Oh ! Ce rayon qui n’en finit pas de rendre votre vêtement transparent !

- Comme sur les pétales de cette sauge rouge de Graham devenus aussi translucides qu’un plomb anobli à l’heure ou le soleil les traverse ! poursuivit-il, le sourire complice de leur transparence. Puis, avec prudence, il ajouta : C’était en hiver, un froid et sombre jour de novembre.

- Cela ne me dit rien. Combien de jours froids et sombres en novembre, y a t-il ? Tant !

- Celui-là était particulier et n’avait pas son jumeau en automne. Souvenez-vous, enchérit-il. Vous aviez froid et pourtant vous étiez à l’abri du vent, mais pas du vent intérieur qui crée la tristesse des jours qui se voudraient ensevelis pour toujours.

Elle ne répondit pas. Elle se souvenait bien qu’il y avait eu des nuits et des jours d’une grande tristesse qui ressemblaient au froid intérieur qui ne peut se raconter à personne sans que la personne qui ne les reçoive ne s’effondre à son tour de tant de chagrin.

- Souvenez-vous ! insista-t-il. Je veux que vous vous souveniez, sinon à quoi bon que je sois là, à votre côté ? Je vous donne un autre détail ? Vous buviez une tasse de chocolat chaud pour réchauffer votre corps et aussi votre cœur en déshérence. Tant de tristesse et personne pour vous secourir. Vous souvenez-vous ? j’étais là, à vous tendre la main. Vous l’avez vue et vous n’avez pas osé la saisir, votre âme en secret qui espérait que sa mort vienne pour que tout s’achève naturellement sans que vous n’ayez décidé de la hâter. J’étais là. Je vous regardais, assis en face de vous. Nous étions à trois pas l’un de l’autre. L’eau a coulé sur vos pieds, depuis. La glace de l’hiver engendrait la pluie de l’été qui abonde en la rivière. Souvenez-vous de la neige tombant du toit, voulant vous ensevelir... presque trente ans avant ces jours. Je vous avais sauvé la vie, physiquement sauvée; et cet autre jour,  c'est la vie de la pensée que je venais sauvée.

- Quatorze ans ! Je me souviens. En effet, les jours étaient froids et sombres comme l’enfer qui veut happer la vie. Vous étiez là, et je ne vous ai pas répondu. J’ai vu en vos yeux un rayon tel un baiser à ma vie que c’est ce rayon que j’ai reconnu sans vous reconnaître. Le corps n’a pas cette transparence que nous espérons telle vous l’aviez, tel vous êtes. 

- Je ne vous ai pas dit mon prénom ; je vous ai juste tendu la main et je vous ai donné ma carte pour que vous m’appelliez, espérant que vous le feriez parce que j’étais venu pour vous. Vous deviez dire mon nom et vous n’y avez pas pensé, trop accaparée par vos jours pour lesquels j’étais venu afin que vous les traversiez avec moi, ensemble, en ce rayon qui vous aime et que j’avais reconnu à des lieux lumière de votre présence. Vous ne m'avez pas reconnu. Vous le pouviez cependant. La première fois, j'étais descendu de si haut que vous n"avez pas douté de mon nom, mais la seconde fois en mon habit physique, vous ne m'avez pas reconnu dans mon habit de ciel.

- Vos seuls mots furent : « Madame, vos yeux ! Tant de souffrance en eux ! » Oui, c’était vous. Je vous avais oublié. Pardonnez-moi ! tant d'indignité en moi à votre égard ! Oh Jean ! Ô Jean ! 

- Vous vous souvenez. C’est bien, dit-il, le regard habillé de chaleur et d’Amour que, seuls, la nature, l’animal, et l’homme, témoignent des bois entrelacés. J’étais déjà venu, il y a trente trois ans, vous secourir, et vous m’aviez reconnu ce jour, pourtant aveuglée par le soleil qui dardait sa lumière de janvier à l’invisibilité du froid de l’hiver. Ne dite ce secret à personne. Sage est ma troisième visite en votre vie. Venez !

Ainsi, l’eau baignant la nature et l’écluse près de la sauge fleurie venaient de révéler à la fontaine des destinées les âmes qui ont leurs pieds baignés. Avant de quitter la rivière et ses chaloupes, ses arbres et ses fleurs, il s’inclina devant elle, puis ensemble, ils s’inclinèrent devant l’oiseau venu sur un épi de blé, s’inclinèrent ensuite devant la Nature endimanchée, resplendissante de vie, et s’inclinèrent devant la terre et ses minéraux qui brillaient pareillement au cristal enfin advenu en leurs chemin liés pour leur éternité. Il lui tendit une rose rouge qu’elle effeuilla pour que sept pétales ornent ses cheveux, tel il l’avait souhaité quatorze ans en arrière et fait trente ans avant.

BL

écrit sur la musique de Neil H from his Album Mermaid

 

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