Béatrice Lukomski-Joly


Ma page Facebook Ma page Facebook

Le retour du cygne

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

Photo personnelle " Cygne sur l'Yonne"  de juillet 2015.

Photo en couleurs réelles

 

Saignée livide, larmes d'un fleuve sévère,

Cygnes clopinent à mon retour imploré,

Et à mon arrivée, revenue de l'hiver,

Dansent sur l'onde froide figée de février.

 

Blancs, tel le nuage qui me ceint l'âme glacée,

Ils caressent d'un ballet ondulé le cerfeuil,

M'invitant à nos retrouvailles oubliées

Que le gel a mis en berne l'instant d'un deuil.

 

Tendant leurs becs orangés vers mes paumes blêmes,

Que les longs pleurs ont crevassées d'un gel gisant,

Ils vont sur le talus, de leurs plumes requiem,

Pour soutirer un sourire à mes yeux déchirants.

 

Ai-je eu plus belle amitié que celle des cygnes,

Offrant à mon attention que le malheur donne,

Leurs palmes sans nobles lauriers verts, d'appels dignes,

Dans les méandres d'une rive ternie de l'Yonne.

 

À peine née d'un frisson au port du désarroi,

Madame montre son giron léger sur les flots,

Et d'une valse improvisée m’accueille avec l'oie,

Invitée à leur joie d'épancher mes lourds sanglots.

 

De la voussure de leur cou à ma vie pâle,

Me glorifiant d'un claquement bref de leurs becs,

Ils content leur joie de me revoir en leur Graal,

Saisie par leur sympathie à ces obsèques.

 

Monsieur tend son long col roide vers mes pieds froids,

Pointant ses prunelles en les miennes assombries,

Semblant dire : « Nous sommes venus, là, pour toi ! 

Tu nous as tant manqués, ô amour de notre nid ! »

 

D'un doigt, je montre la trace d'un enfant ravi,

N'étant plus, sondant leur sol de paille sur l'ivraie,

Et ma pensée livre, d'une perle trahie,

Le doux zéphyr d'un printemps décrépi en mai.

 

C'est l'heure d'aller ! Leur dis-je, mélancolique.

Si vous portiez mon chant sur la lyre du temps,

Glissez jusqu'à Epineau aux rives pudiques,

Pour que mon visage gonfle son souffle, longtemps !

 

Écrivez sur l'or des maux, le lai endormi

Qui n'a jamais achevé sa forme au levant,

Et que nos vols à nos droitures qu'amour blêmit,

S'élèvent au ciel qui me voit de spleen pesant.

 

Photo personnelle " entretien avec une oie libre"

Petit frère.

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

illustration Pixabay -photo libre de droits- " détail d'unestatue à Hambourg, église saint Michel"

https://pixabay.com/en/statue-hamburg-michel-woman-child-3735020/

 

Point ne t'inquiète, petit frère !

Sur maman vieille, je veille,

Quand elle faiblit ; ton souvenir veille,

Quand elle pleure regardant ses lavandes ;

Quand d'une prière, elle te demande, 

Triste de ton absence, petit frère.

 

Point, ne t'inquiète, petit frère !

Si de sa vieillesse belle et fière,

Je ne voyais la trace de la Lumière,

Malgré blessures, plaies et outrages,

Malgré affronts, désordres, et rages,

Serai-je fidèle à tes vœux, petit frère ?

 

Point ne t'inquiète, petit frère !

Qui te demande au chevet de son couchant ?

Elle, moi ? Nul ne t'oblige à son dernier chant,

Ni les orages, moins tes belles vertus,

Que conscience abandonne, abattue,

La main dans son désert, petit frère.

 

Oh ! point ne t'inquiète, petit frère !

Ne suis-je pas là à adorer sa vie sans plus d'espoirs,  

Quand l'étreint la peur de ne plus te revoir,

Ses matins, tous tes silences, et ses regrets,

Tous ces ombrages laissés dans la forêt.

Quelle est ta quête petit frère ?

 

Quand de ses souvenirs douloureux,

Elle dit ce que furent ses jours heureux,

Le sanglot jaillissant de ses yeux,

Dans lesquels, j'ai une petite place avec ses aïeux,

Me diras-tu si ton amour est de glace ?

Petit frère ! oh petit frère ! Quoi t'agace ?

 

Quand elle dit nous revoir de mémoire

En ma chambrée interdite, toi et ton mouchoir,

Ô petit frère, toi bravant pourtant l'injuste,

Que furent ses paroles tièdes, parfois augustes,

Et aussi si dures que tu la laisses

Sur le bord de sa mort venant ? Toutes ses faiblesses !

 

Oh ! Petit frère, tellement aimé, toi son flambeau, 

Tellement préféré, parce que si beau,

Parce que représentant de la force

Ainsi que de l'ordre bleu, ton écorce,

Où es-tu que je lui dise, l'air courtois : 

"Il va bien ! Il t'aime. Il pense à toi."

 

Ne t'inquiète pas, petit frère ! toujours ! 

Je prends soin d'elle tous les jours,

Ayant abandonné dans la fosse les mots sourds,

Les tristes rancœurs et son fol désamour,

Pour que tu lui survives, sa fronde,

Quand elle ne sera plus de ce monde.

 

Oh ! Petit frère qui me lit, parfois ! affolé, 

Qu'est une reine-mère, sa tiare volée,

Délaissée à la couleur de ses rides à venir,

Quand sa mémoire trahit ton souvenir,

Et que je l'épanche, toujours obligée de m'effacer...

Ne t'inquiète pas, petit frère bleu, tant blessé !


Et si d'un coin de ciel, remuant ta vie, un peu !

Au-delà de la tombe, au-delà de la mort, si peu !

Tu voyais le voile noir déposé par tes mains,

Que sera cet instant déployé d'une agonie au matin,

Elle, retrouvant sa souvenance sur la rive

Que pardon n'aura pas effacée, soumis à la dérive ?

 

Point ne t'inquiète, petit frère en sommeil !

Sur maman si vieille, tous les jours, je veille,

Quand elle faiblit, malgré les douleurs,

Regardant ses lavandes quand elle pleure,

Quand elle me supplie, ses yeux à genoux,

Me priant, l'âme en peine, de la sortir de la boue.


Pourtant, petit frère, sachant que point je ne la reverrai

Si tu clamais ton retour, toi, seul élu en son cœur de jais,

Par tant d'années d'oubli derrière mes volets,

Serait-ce supplique ultime pour la mémoire d'un bolet

De croire que tout est possible pour l'humaine loi

Quand l'amour est la dernière rose aux abois ?


Faut-il être de bonne foi pour ainsi appeler,

S’époumoner en vers déchirants modelés,

Petit frère ! rien pour moi, tout pour elle,

Même avec quelques claques comme voyelles

Alitées sur le seuil, ses lavandes fanées,

Petit frère, ton hamster dans ta main agrippée !

 

Ne m'en veux pas, ne m'en veux plus de Croire,

Mes consonnes déposées dans ce trésor, ce soir,

Qui fut, est, le meilleur de ce qui fut, seul celui-là !

Un triste soir, une triste nuit, petit frère, par-delà

Sa vie suppliant dans l'oubli des allures muettes,

Pour une gerbe à naître au cimetière ; Ô Odette !


Oh, petits frères ! vous qui laissez l'entier soutien

Entre mes mains, souffrant  avec elle son quotidien,

Entendant sans relâche l'expression de vos prénoms,

Comme si je n'existais toujours pas en l'âme de Junon,

Serez-vous au temple des lys que j'ai fleuris,

Malgré vos inimitiés pour toutes plaidoiries ?

 

 

 

La Lettre.

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

Illustration d'après le  roman " L'ombre des lucioles " d'Isao Takahata

 

Le temps est tombé sur le souffle d'une feuille,

Qu'automne recouvre de couleurs veloutées ;

Et lorsque l'éclair frappe l'arbre, et l'écureuil,

C'est le cri du deuil que pousse l'infortuné.

 

L'épousée giboulée se tient au logis feutré,

Et la lumière gémit de l'insulte subie,

Car il n'y a de plaie que face à l'inimitié

Jetant sa froideur aux traits de celui qui bénit.

 

Feuille tournoyait dans le vent, scrutant sa couleur,

L'âme triste, endeuillée une seconde fois,

Que nul n'a voulu avouer, pourtant de valeur ;

Qu'onde au-dessus des nuages donnait d'autrefois.

 

Le soleil s'est couché, serrant l'ouest de tristesse.

Le défunt espérant la beauté d'un simple salut,

Que la mort voilait dans le ciel sombre d'ivresse,

Repartait vers son ciel déversant ses pleurs d'exclu.

 

Ô ! toi, disparu ! mandant à l'âme qui perçoit,

Voulais un baiser par la feuille tournoyant vierge ;

Tu n'eus que le décès d'un sentiment aux abois,

Qui te frappait. Tu n'espères plus rien de ce cierge.

 

La brise a levé la bise et le baiser trahi

Qu'espérait la jeunesse revenue de l'être

Est reparti tel il vint, sans un propos dit.

J'ai vu ses yeux, la nuit  et le jour jeta sa lettre.

 

Devant sa tristesse, il partit, disant : «  Merci !

Vois ces lucioles brillants sur terre et dans ciel !

Ne brillent-elles pas pour ceux qui les voient, ici ?

Que feuille vole dans l'air du temps ; Ô voyelles ! »

 

23 octobre 2017

 

Agnus Dei - Samuel Barber

Les pas de fourmis

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

Du peintre iranien Rassouli

http://www.rassouli.com/

 

Puisque nous savons ce que la science enseigne,

Et que nonchalants nous allons, nos cœurs saignent !

Puisque nous aimons voiler nos yeux de lueurs sombres

Et que nous croyant humbles, nous sommes dans l'ombre,

Bercés d'illusions que nous aimons pour nous,

Hurlant nos perfections qui ne sont pas nous,

 

C'est soi qui ricane de découvrir sa noirceur,

Derrière le voile qui n'est que de terreur.

Quand levé à moitié, dans la lumière ombrée,

Nous croyons être sublimes dans  la rosée,

Et que nous découvrons que rosée habite

Au-dessus de la boue dont nous sommes le rite.

 

Les grandes enjambées deviennent pas de fourmis,

Lorsque nous les avons crues grandes amies,

Et terrible est le jugement porté sur soi,

Affublés d'êtres noirs nous saluant aux abois !

C'est ainsi quand mort glane enfin son trépas.

C'est cela que rêve montre du dernier repas.

 

Le rêve

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

Tableau d'Arild Rosenkrantz

http://www.arildrosenkrantz.dk/uk/bio.html

 

Puisqu'il nous faut mourir une nuit, je m'incline ;

Et que dans la mort, tout se fige dans la bruine ;

Puisqu'il nous faut nous laisser seules, cette nuit,

Et que dans l'abandon, tout se brise d'ennuis,

De l'inachevée ardeur des amours imparfaits,

Je sais le cœur contrit à la forge des forfaits.

 

Des vœux pieux non aboutis, qui m'inquiètent,

Puisque la mort survient, terriblement muette,

Sans dire un seul mot pour nous prendre sur la grève,

Que la main divine prenne vaillamment le glaive

Pour que nos forts vécus endeuillés dans le rêve,

Ceinturent hardiment nos heures de trêve !

 

Laissant affligés et stériles nos cœurs lourds,

Qui ont commencé leur lent compte à rebours.

Nous regardons le passé figé qui nous attend,

L'ayant écrit au livre des vies d'espoir latent.

Faut-il pleurer l'abyssal déni en Akasha

Que nous ne prendrons plus jamais entre nos bras ?

 

En cette vie !

En cette vie !

 

Déceler les oublis que nous ne voulons voir

Malgré la connaissance sue un de nos soirs !

Faut-il languir trois vies pour éteindre le volcan

Qui a pris feu un printemps, sous un ouragan ?

Tu t'en vas, je m'en vais, il est déjà parti.

Nous mourons de notre enfance d'un pas aigri.

 

Puisqu'il reste encore de très longs mois à vivre,

Puisque nous pouvons faire refondre le givre,

Comme, si souvent, nous le tentons d'actes bons

Malgré le malheur que nous aimons vagabond,

Emplissons la pensée du temps de ses pardons

Pour que larmes soient celles du beau papillon.

 

Puisqu'il a fallu que tu viennes de ton ciel,

Le regard âpre face aux carences vénielles,

Puisqu'il fallait voir ce que je ne voulais pas voir,

L'esprit s'alitant pour sa paix qui ne peut déchoir,

Ne prenant pas nos mains tâchées d'opprobre noires,

Tu as fondé ma mère entre mes bras à ta Loire.

 

En cette vie.

En cette vie.

 

 

GIBRAN, Khalil - Le prophète - 16 La Souffrance, 17 La Connaissance de Soi et 18 L'Enseignement.

Fil RSS des articles de ce mot clé