SPLEEN extrait du poème "les oiseaux"
Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaireTableau d'Emma Florence Harrisson
https://en.wikipedia.org/wiki/Florence_Harrison
Souvent hirondelles dansent à mes fenêtres,
Ballets que mes cygnes admirent en maîtres.
Noble cadeau de la vie à mes tristesses sans fin
Lorsqu'elles observent de ma mélancolie, son parfum.
L'une, missionnaire, cogne de son bec à ma vitre
Et soupire de ne me voir lever les yeux de mon pupitre.
Au-dessus des nuages, des pluies, des saules élégants,
Elles virevoltent, papillonnent, psalmodient, céans,
L'air des dimanches que messe avec pudeur
Me raconte dans mes os meurtris du labeur.
Me donnent-elles le courage, quand vacillante,
Amicales à mon âme sacrifiée, elles chantent,
Que leur fidèle présence m'est un doux serment.
« Souviens-toi ! » disent-elles à l'heure du tourment.
Petit bec cogne encore et encore à ma vitre vagabonde,
Réclamant ma vaillance jusqu'à ce que je réponde.
Et que vois-je ? Hirondelles à mon regard damassé,
Plantant l'aiguille du courage en mon corps lassé.
Vont-elles exhorter les cygnes quand, priant d'amour
Un lit de plumes tisse enfin mon sourire à l'entour,
Et que derrière écueils acérés et vastes soupirs,
Elles filent de laurier la vie et la nimbe d'un demi-soupir.
Heureuses sont-elles de toujours me troubler d'ellipses
Quand ma plénitude déserte, quand ma joie s'éclipse,
Quand rêverie me faiblit, quand spleen m'endolorit,
Ce qu'à Weimar j'ai laissé de beautés et d'harmonie
Oh ! M'offrez-vous douces fleurs et blonds épis de la vie
Que j'invite encore tout le prestige des lys sur l'Ilm
Que mes cygnes aux rives de ma rivière ondulante
Chantent avec elles l'incroyable guérison sibilante !
Et cygnes s'étourdissent à danser avec les gorges-bleus
Par-delà les étoiles, par-delà les nues bleues
Prenant de mes hirondelles l'habit sombre des jours
Qui n'ont pas trouvé en mes belles-de-jour, l'amour.
Oh que je voudrais être leur envol léger à ma lèvre
Qui de rien ne se soucie quand l'épi de seigle se lève,
Quand mes chats à ma fenêtre guettent leur vol épris
Que jamais, elles ne craignent pour rester mes amies.
Souvent hirondelles, à ma fenêtre, se lèvent
Dansant chorégraphies que mes cygnes rêvent.