Les cathédrales de pierres
Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentairephoto issue du blog : http://teambugey.over-blog.com/article-16068003.html
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La forêt est un temple, façonnée de chemins argentés,
Dans laquelle s'élève abondance de cathédrales.
Ciselées de lumières et de dentelle ombragées,
Elles bruissent des musiques d'orgues ancestrales.
Au sein des rayons que le soleil chatoie d'ondes d'or,
De trois harpes, vingt-quatre vieillards resplendissent.
Des chants par mille s'élèvent, et le temps les adore.
Pas un bruit, sinon un silence d'arbres caressant sa pelisse !
Ô ! Montagnes ! Tous ces monts d'ascension à l'envol tendu !
Ces châteaux abrités de sagesse aux sapins, pensent.
Ces conifères aiguillés aux cascades entendues
Ruissellent de source vive, et dans la pureté de mon cœur danse.
Dans ses jardins serpentent torrents creusés de main divine
Que sa chandelle encore allume de mémoire alpestre.
L'arc d'étoiles brille de leurs cimes et les racines
Ont mille flambeaux de cent roses célestes.
Elle sarcle le feu créateur, sans amertume.
Nature Mystica flambe à mon front perlé d'éclat
Que pluies sur nos branches symphonisent* de brume ;
Et c'est la feuille qui s'envole jusqu'à trépas, sans trépas !
Le plissé des falaises enseigne les avenirs qu'il dépose,
Qu'aucun livre n'enseigne, car il est, et seul, se signe.
De tous temps, vertus vraies enseignent ses roses,
Aimant ses flancs de pierres et ses coteaux de vignes !
Champs, bois, prairies, habits des cathédrales de pierres
Que vos narcisses follement odoriférants m'honorent,
Comme un ballet de pétales se déployant d'un sourire lierre.
Sur la couverture verdoyante, je me couche et m’endors,
Me taisant, car il n'y a de mots qui ne glissent en bouche,
Sans que le temple ne se construise davantage !
Ô ! églises de pierres, mes douces souches !
Forêt des sagesses, je vous ramène en mon âge.
N'ai-je rien vu de plus beau que sa cathédrale,
Sur ses falaises stratifiées qui, tout, donne, tout, apprend,
Tout aime, tout chante, et garde secrets ses vœux fatals,
Qu'au plus intime de l'esprit, prirent forme lentement ?
Sous nos regards lavés et de chaleur ondoyante à la vie,
Dans la clameur du cri du bien-naître au corps de l'esprit,
Que plus personne ne voit ni ne réclame d'heures embellies,
Qu'ai-je entendu des cors et des trompettes qui me prit ?
Je veux asseoir la falaise au faîte de sa hauteur, sur mon flanc,
Dans le coeur des pensées oubliées pour qu’elles renaissent.
Je veux glisser sur l'aile du vent, et approcher le nuage blanc
Ayant forme d'ailes, pour laver l'imposture des folie qui paissent.
À la pointe de la lance des élans téméraires, je veille,
Pour l'éclat ruisselé des sapins que l’œil voit au grand jour,
Sous l'écorce fleurant la sève des pins anoblie par l'abeille,
Je clame l'invisibilité des êtres de nature au grand jour.
Je veux, des ruisseaux, des rivières et des cathédrales de pierres,
Marier les cailloux sous l'usure de leurs flancs renversés, si las,
Qu'aux alluvions, l'Albarine a embrassé de son lit de terre,
Mouillés à la vague du lac de Bertâne que l'aile du cygne bat.
Je veux, sans aigreur, témoigner de son roulis de clocher,
Baptisant de pureté et de grâce sa verte pâleur cachée,
Que truites et flots frayent d'amour à l'ombre des rochers,
Sous l’œil amoureux des myriades de sylphes amusés.
Quelle fut ma plus grande révolte, si ce n'est l'éloignement,
Bien que me voyant en plaines, monts et combes, recouverte !
Aux heures des blessures réclamant l'Amour des pas lents,
Me posant de repos en grandes enjambées vertes !
Que Bugey manque à ma verdure, ma grande messe !
J'ai, de tous temps, dessiné le retour aux cathédrales de marbre
Qui de leurs sentes vaporeuses appellent les grandes liesses,
Pour l'affinité des parfums, qu’envoûtée, je suis l'arbre.
Nature, cathédrale et temple ! Mazières et ses marches !
Aux promontoires des villages que Lacoux adore d'un regard,
Que La Raggiaz pleure aux pieds meurtris des longues marches,
Ô, cathédrales de pierres sous la voûte des sapins verts, je pars.
Des ciels encilés*, que n'ai-je vécu pour vous d'heures longues,
Toute une vie, partie des cimes que pleure encore le cygne.
Me créant retour de poète prolixe, je vole d'ailes oblongues
À la Vierge esseulée de Longecombe, je deviens le signe.
Je reviens, les pas désenlisés des neiges ourlées de rose,
Que le bel enfant à sa victoire suspendue, aux lèvres fissurées,
Dessine depuis des décennies. Oui ! je l'ai ma victoire, si j'ose !
Cathédrales du Bugey ! Cathédrales d'arbres sculptées,
Rose est ta verdure. Blanche est ton nom à ton corps veillant.
Au temple de mes entrailles que vies saluent et bâtis de pierres.
Blanche est ta forêt. Voile est la traîne de tes nuages souffrants.
Et me voilà à jouer sur ton orgue, les chants soufflés d'hier.
* Licence poétique