Béatrice Lukomski-Joly


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Au hasard : chapitre 9

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

Je marche pieds nus. J'ai jeté mes sandales. Je n'en ai plus besoin. Je les ai regardées avant de les déposer dans un fossé, disant merci à l'homme, que je ne connais pas, qui les avait fabriquées, sans savoir quels pieds, elles chausseraient. Il faut toujours remercier l'ouvrier. J'ignore qui a fait l'objet qui me sert, mais l'objet qui me sert est le bienfait de son travail. Si nous avions conscience de la valeur d'un homme ayant œuvré pour nous dans son silence, nous serions riches de la valeur du monde. Je regarde mes sandales déposées. Je me demande ce qu'était l'état d'âme de l'ouvrier qui les a conçues ; était-il triste ? Était-il joyeux ? Avait-il femme et enfants au foyer ? Avait-il faim ? Avait-il froid ? Avait-il chaud ? Pleurait-il ? Aimait-il ? Était-il malade ? Avait-il de l'humour ? Qui est-il ? Un homme est derrière chaque chose, même d'une fleur dont il a ramassé le bulbe de narcisse que je plante en ma terre. J'admire le labeur des hommes à cet instant, là, où je dépose mes sandales de cuir dans le fossé. C'est mon âme de conscience qui vous l'écrit, moi, Jean Christophoros de Lebenkreutz ! J'ouvre vos âmes de conscience. Je le dois au monde, car c'est l'heure de sa plénitude. C'est le commencement de la philanthroposophie qu'initié advient pour nous la donner. Pas moi ! mais, lui ! Je suis le passeur sur mon sentier. Mon neuvième jour naît à Moi.

Je peux me heurter à un caillou ; et le caillou partage avec moi une double responsabilité, car il est du futur. Je le vois. J'ai mal pour ma pierre qui est dure comme le silence qui n'a encore rien dit à haute voix. Je vois son être. Son être me fixe du regard qui appartient à la plus haute des sphères. C'est la fin de l'hiver. J'ai trente-trois ans. C'est mon neuvième jour de marche. C'est ma neuvième marche sur mon escalier de marbre blanc comme le blanc de la neige qui crisse sous mes pas, blanc comme la robe lumineuse de mon ami qui m'attend avec son ami. C'est ainsi. J'ai marché de désir. Je marche aujourd'hui dans l'amour de ce que j'engendre, de ce que je suis. Je marche, dans la plaine bordée de falaises, parmi les arbres et les fleurs qui dodelinent leur cœur dans le souffle souverain.

L'arbre est un don de la nature, la fleur aussi ; et la nature est mon zénith solaire. C'est ainsi. Ils se donnent à l'homme ; et l'homme ignore encore que se donner est de l'amour absolu. L'arbre et la fleur sont là pour en témoigner comme l'homme en témoigne lors de son aurore ultime. Mes pierres, aussi ! Elles portent, toutes, leurs visages visibles en leurs corps figés, qu'elles m'offrent d'amour dans leur discrétion. Je les vois. Je les montre à un passant sur mon sentier. Il les voit, puis se ravisant, me dit fou, comme d'une vision insoutenable. C'est difficile de rencontrer ces êtres intérieurs, car ils disent leur solitude interminable, tant que les hommes n'ont pas abouti leur chemin. Non ! je ne suis pas fou ! je vis le sentier ; et le sentier est pureté dans nos luttes.

Je vis cela ; je pense cela. Alors que vivant cela, alors que pensant cela, je vois le serpent m'observer. Il est là, abrité par la pierre qui attend son soleil, là, où le gouffre n'éteint pas ses passions dévastatrices. Je marche au-dessus du précipice. Il étend son dos ; et de son dos arrondi, développe ses volutes ondulatoires ; se raidit ; se tend et s'étend ; me laisse poser mes autres pierres pour assurer ma traversée de l'abîme. Il regarde en bas ce qu'il a posé en haut et trouve belle la laideur quand les hommes aiment la laideur. Il trouve le soleil plus beau que lui-même, mais ne veut pas le dire aux hommes, bien qu'il ait besoin de sa chaleur et de son amour. Il faut donner aux hommes la beauté du sentier quand bien même il a ses dangers comme tout ce qui est entre la beauté et la laideur. Les rochers, qui lui servent d'abri en été, ne sont pas ceux des pierres qui sont de la pierre de fondation donnée en hiver pour renaître, et qui ne sont pas encore les siennes. Regarder l'en bas, regarder l'en haut et aller avec certitude. La nuit est mon piédestal pour mon pont vers le jour. C'est ma neuvième nuit. C'est mon neuvième jour. J'ai trente-trois ans.

Je pense à mes enfants que la lumière attend, qui sont si loin de moi, qui ont vu la cité aux dômes revêtus d'or, sans oser encore un pas volontaire. Pensant à leurs regards d'enfants, je me souviens que j'ai sacrifié une part de moi pour ce chemin offert, car il est bien de sacrifier une part de soi pour le chemin d'autres. Je me rappelle avoir écrit en lettres de feu, dans leurs firmaments, leur rédemption aux chemins leurrés qu'ils ont pris un jour, en autre vie, il y a longtemps. Je les vois. Je les regarde. Je les aime. J'aime le beau en eux. J'aime aussi le pire en eux. On m'a dit fou d'aimer le pire en eux. On m'a laissé seul pour cela. Les hommes n'ont pas compris, pas même ceux qui se disent sages. Ils m'ont condamné à la solitude ; et la solitude m'a souhaité sa bienvenue. J'ai dit que j'étais fier d'eux. Les gens m'ont condamné, car ils n'ont pas compris que dans tout mal, le bien arrive ; et que c'est ce bien futur que j'aime au travers d'eux. Le mal engendre toujours un bien, et quand le mal engendre un plus grand mal, c'est pour un plus grand bien qui prend son temps pour arriver. Les hommes m'ont demandé de les abandonnés. J'ai refusé. Qui étaient-ils pour me demander cela ? Qu'avaient-ils compris de l'amour pour me laisser aller, seul, dans l'expression de l'Amour ? Seul, l'Amour a été, est, mon maître. Seul, l'Amour est mon guide. Je me vois aimer les enfants perdus autant que peut l'amour, en laissant ceux qui n'ont pas besoin de ma force pour aller de leurs propres forces, car ils le peuvent. Ne jamais supprimer les forces puissantes des âmes en chemin ! Juste être là et les aimer. Ils sont. Le serpent a aimé nous attaquer au quotidien en ces jours blêmes ; et j'ai laissé le serpent œuvrer, faute de pouvoir tout combattre, car une destinée appartient à l'être qui la porte. Je les aime. Je les aime tous comme ils sont, même lorsqu'ils ont apporté le serpent en ma maison dans mon lointain village. C'est curieux comme ce sont ceux d'entre eux qui commettent le pire des malveillances qui ont vu la cité d'or aux dômes flamboyants dans l'azur bleu devenu jaune lumière ! C'est ainsi. Il y a des mystères qui ne lèvent leurs voiles qu'au jour achevé des destinées. C'est autre combat contre le serpent qui me prit le plus d'heures, car combattant dans le gouffre des passions, des vilenies, des affronts, des perversions, des assuétudes, des volontés contraires. Le sage n'est pas forcément celui qui arrive en premier à la cité céleste. Moi, Jean Christophoros de Lebenkreutz l'affirme. Tout cela fut, après que je vis l'étoile dans le ciel émeraude devenu orangé, puis jaune étincelant. J'ai, là, élimé plusieurs épées. C'est ainsi. Ils deviennent beaux. Ils sont beaux. Il n'y a aucune laideur qui ne devienne, un jour, belle parce que c'est ainsi. Tout se transforme. Je les aime. Je ne les ai pas abandonnés sur leur sentier. Je suis leur force ; ils sont la mienne.

Les hommes aiment leurs insuffisances et adorent leur serpent plus que l'aurore des matins. Ils ne savent pas que leurs insuffisances sont des trous noirs dans leurs âmes, que mon regard a peine à tenir. Ils se nourrissent des ombres, trouvant que les ombres sont de meilleurs aliments que la lumière absorbée par le blé et le cep. J'ai sangloté de la vilenie des hommes. J'ai sangloté des heures de ne pas voir l'amour flamboyant dans le tout alentour que porte ma terre. Une âme qui sanglote, c'est pareil à un tremblement de terre, et encore à un tsunami qui, tout, dévastent avant de reconstruire ce qu'ils ont détruit. Il n'y a rien qui ne puisse se reconstruire quand le malheur passe et frappe à nos portes sauf si nous aimons, dans la nuit, le jour qu'il apporte. J'ai mis de la lumière partout où l'ombre a surgi. Je mets la lumière, là, où l'ombre ne semble pas pouvoir être transformée en son contraire. Il faut beaucoup aimer gratuitement pour servir la lumière, car je ne récolte rien des actes d'amour. Je donne. C'est mon sentier.

Mon ami du matin resplendissant dans l'azur flamboyant me dit :

- Que m'as-tu donné pour que je sois ? Dis-moi !

Je regarde en ma besace de lin blanc.

- Sagesse !

- Et encore ?

- Conscience !

- Puis ?

- Amour !

- Je l'ai vu.

- Tu l'as vu.

- Je l'ai reçu.

- Je te l'ai donné.

- Je l'ai pris en moi.

- Et encore ?

- Mes imperfections !

- Elles t'appartiennent.

- L'amour ?

- Il appartient à tous.

Et l'amour brille dans le monde chaque fois qu'un de ses actes conduit le don qui ne reçoit rien en retour. Il faut beaucoup de conscience pour se donner sans rien attendre. C'est pourquoi les hommes sont si peu empressés d'aimer. Ils espèrent toujours une parole, un regard, un merci, qui diraient combien ils sont bons, mais non ! Les hommes appellent cela de la reconnaissance. Seul l'amour reçoit l'amour et de son enveloppement reconnaît ce qu'il est. L'amour ne se remercie pas lui-même. Il ne se reconnaît pas lui-même, car il est. C'est l'âme de conscience qui le dit ce jour. Je l'ai vue à l'aurore après ma nuit. Je l'ai vue dans l'unique aurore et sa chaleur primordiale. Une étincelle ! Le cosmos ! Le logos ! Un verbe dit ce qu'il est, et tout se répand. Il proclame : Je suis, et son « Je suis » retentit comme le son d'un cor, accompagné d'un gong dans l'air, qui se met en mouvement lors du son qui résonne d'écho, toujours. C'est un Aum musical. Un Aum est un don que le cor prend sur lui. Je suis la réverbération du son. J'aime savoir cela. Je suis la lumière du son. Tout est sa réverbération ! ma pierre, ma rose, mon cygne. La nuit me l'a dit.

Mon ami aux cheveux mordorés sous le soleil levant, de l'Orient vers l'Orient, s'assied au cœur de la lemniscate en mouvement et me dit « dessine-moi l'amour qui est le tien ! Montre ce que tu as fait pour lui !

- Pourquoi dire ce que nous faisons en son cœur puisque tu le vois ?

- Car la parole est résonance ; et qu'elle est, à l'acte, le prolongement de son action. Nous avons besoin des humains pour son rayonnement.

- Alors, laisse-moi m'asseoir dans l'herbe pour que j'intériorise ce qui fut d'actions et que je dois te donner par mon verbe intime.

- Assieds-toi, Jean ! épouse l'herbe ! Je me recueille à tes pieds. Leur nudité est splendeur. Je t'accueille. »

Je fais silence. Je me concentre, puis raconte enfin ce vécu différent que je donne au monde.

- C'était un après-midi de septembre quand l'équinoxe d'automne fait du jour l'égal de sa nuit. Je vis sur mon sentier une femme gravement malade. Elle n'avait plus ni voix ni gestes, comme d'une âme sortie d'elle qui n'espère pas revenir pour habiter son corps. Elle était alitée sur un lit de mousse humide et l'humidité envahissait sa vie au point qu'elle avait voulu assécher ses os et ses artères. Les artères s'étaient figées et n'irriguaient plus son crâne gelé. Ses articulations s'étaient solidifiées. C'est ainsi que je la vis sur mon sentier, inerte, laissée pour morte, dans une vie végétative qui ressemblait à la mousse sur laquelle elle dormait. Elle n'était plus qu'un corps de vie, sans âme sentante, ni pensante. Ce fut pour moi un choc intense de voir cette vie inconsciente que j'en vécus une profonde pitié dont la compassion fut mon désir puissant de l'aider. Te décrirais-je cette pitié et cette compassion que j'en revis chaque moment gravé dans sa vie. J'étais secoué intérieurement, pareil à l'éclair frappant un arbre que l'arbre brûle d'émotions et de tristesse. Je me dis qu'il me fallait réparer cet arbre et lui ôter la nature de l'éclair qui l'avait foudroyé. Pari difficile mais je le fis, décidé et volontaire. Elle était belle comme une rose encore fleurie de son été. Elle était jeune de cet âge qui fait le milieu d'une vie. Elle était une fleur ne craignant plus les prédateurs. Elle était son propre prédateur. Je n'avais jamais vu d'humain malade à ce point, bien que j'en eus rencontrés beaucoup sur mon chemin. Si elle était sur mon sentier, c'est que j'avais au-delà de la compassion, une raison de l'aider : elle en moi et moi en elle, par et pour l'amour qui rayonnait en moi pour elle, qui allait le recevoir. Nous disons toujours l'un dans l'autre quand les cœurs vibrent d'unisson. Je savais soigner d'onguents et de plantes, et encore de gestes finement appris, mais jamais je n'avais encore tenté d'être pleinement l'autre. Ce fut d'une immense spontanéité que je décidais d’œuvrer pour la revoir revivre en son corps de conscience. Il me fallait aussi donner au monde ce qu'est la quintessence de l'amour vécu, qui agit et guérit. Je savais que je pouvais le faire bien qu'un grand nombre d'heures soit utile pour ce geste. Oh ! un grand nombre d'heures ! Et aussi un grand nombre de témoins muets car il fallait que cela soit inscrit.

Ces témoins se nommaient Christine, Irène, Albert, Alain, Daniel, Stéphanie, Brigitte, Séverine, et bien d'autres. Séverine fut celle que j'appelais souvent lorsque j'avais besoin d'aide, car je la savais silencieuse et respectueuse dans la droiture de l'âme, bien qu'elle fut tonitruante face aux ignominies des hommes. Droite comme un chêne, sonore comme l'orage qui passe à ses heures, d'amour offert, Séverine le Ru comme d'un ru abreuvant la terre qui a besoin d'eau mesurée pour vivre. Elle était grande comme une âme qui veut s'élever, forte comme un soleil qui resplendit les jours de pluie. Elle fut combattue par ceux qui avaient vu, pour que je puisse agir sans être attaqué.

- Il existe une loi dans le monde qui exige une protection sur ce qui descend d'en haut pour que vive l'en bas, me dit mon ami ensoleillé. Elle est d'autant plus active lorsque le passeur vérifie un fait nouveau avant qu'il ne donne à la lumière terrestre ce qui est nouveau, car c'est un sacrifice que d'accepter d'être un passeur de pensées en actions. Je te protège. Il est donc normal que ton amie terrestre ait eu à subir le contrecoup de ton action. C'est un sacrifice consenti de sa part avant de naître. Nous l'honorons et nous l'honorerons de bien des manières, bien qu'un sacrifice soit un don, car elle a permis que cela soit. Il y a foule d'âmes qui nous servent le cœur joyeux, sans savoir qu'elles nous servent. Elles aiment. Elles aiment tant qu'elles sont semblables à nos rayons. Elles arriveront avant beaucoup d'autres sur le sentier. Continue... ! Jean !

- Cette dame allongée sur la mousse humide de septembre portait un mot ciselé sur son front : Temple. Il était mot et image. Cela m'a beaucoup impressionné. Ce mot était aussi son nom. Il fallait bien que je m'y arrête pour découvrir ce qu'elle renfermait entre ses murs, cette vie devenue inoccupée ! Je la déposai sur un lit en draps de lin blancs. Elle n'avait ni chaud ni froid. Moins encore faim ni soif. Rien ! Seul, son cœur battait sous sa peau. Seule, sa respiration racontait une vie en soi ; tout ! Le rythme ! Je la déposai sur son lit blanc. Je vivais, en esprit, l'action de l'aliter sur un autel de marbre blanc, brillant au soleil de midi, quand l'aurore a fini d'achever d'établir son règne. Chaque matin, je vivais intérieurement et intensément cette image. Il n'y eut pas une aurore où j'oubliais de penser son autel dans son temple. C'était un recueillement. Ne jamais aller vers un malade sans oublier de saluer le temple qu'il est, avant tous soins. Je m'inclinai donc en pensée. C'est un rythme qui ensemence la vie. N'est-ce pas ce que je voulais pour elle ? Réensemencer sa vie !

Jour après jour, mes mains massaient son visage, ses bras, ses doigts, ses jambes, ses pieds, lui disant chaque matin : « Madame Temple ! Je suis Jean, Jean Christophoros de Lebenkreutz ! J'ai trente-trois ans et je suis votre ami aussi longtemps que votre vie restera éteinte et au-delà si vous m'acceptez comme ami. Ce que je vais vous offrir n'appartient qu'à vous et rien ne vous rendra redevable à mon égard.

Chaque matin, je me présentai ainsi car la vie désertée doit entendre qui s'occupe de soi. Je savais qu'elle m'entendait dans son éloignement vers un ailleurs d'où elle était aussi l'assoupie. Ma compassion grandissait au fur et à mesure que je comprenais son inconscience, en haut, en bas. Cela me faisait mal de la savoir l'endormie des deux mondes. Chaque fois, il me fallait transformer ma compassion en amour vivant qui rayonnait de moi vers elle, bien que pitié et compassion – ces deux sœurs jumelles – soient tout amour.

- Jean ! Je t'arrête un instant ! dis-moi ! Pitié et compassion sont amour, dis-tu, mais pour aimer, faut-il toujours passer par ces deux sentiments ?

- Elles en sont le chemin. Elles en sont le moyen. Qui aime de son cœur conscient n'a plus besoin de ces deux sœurs pour aimer, car il aime. Aimer est sa nature profonde. Pour l'instant, ma vie a besoin de ces deux sentiments, mais ne les vis-je pas spontanément sans avoir à leur demander leur présence ! Ils me sont acquis comme le soleil se lève chaque matin. C'est une vérité et une vérité n'est plus contestable. Qui nie que le soleil se lève chaque matin ? personne ! Qui nie que l'amour existe ? personne ! Car il y a toujours un enfant conçu que les parents aiment et cet amour est le témoin de ce noble sentiment.

- Mon ami ! Jean ! Jean Christophoros de Lebenkreutz ! je t'écoute d'adoration car j'adore tes matins et le matin unique qui nous offrit tous les matins du monde. Continue !

- C'est en ce matin unique que j'ai agi, Ariel ! Bien qu'il y ait eu deux matins, ne sont-ils pas le même matin, car nés du même soleil rayonnant ?

- Oui ! je l'affirme avec toi. Je t'écoute.

- Quand je massais son corps inerte, je pensais à la sève qui circule dans l'arbre, la fleur, la rose, et je me pensais semblable à une racine qui grandit pour mieux vivifier ma terre et sa nature. C'était ainsi. Le sang circulant en elle était la sève en mouvement que le soleil donne de sa lumière et de sa chaleur. Je massais ensuite chaque articulation, pour leur redonner leur mobilité. Je voyais chaque cartilage s'irriguer à chacun de mes touchers. C'est ainsi qu'endormie, elle reconquit la souplesse. Oh ! non pas qu'elle bougeait consciemment, mais la posture dans laquelle je la situais n'avait plus cette dureté immuable et figée ! Elle pouvait la conserver et ce fut ainsi que je pus l'aliter sur sa droite, sur sa gauche, à plat dos, tour à tour. C'était un grand pas en avant. Bien que ne réagissant pas à mes paroles, je lui disais, avant chaque geste, ce que j'allais faire pour qu'elle entende et ne vive pas son corps comme d'une volonté soumise bien qu'elle le soit. Je l'appelais. « Madame Temple ! Je suis Jean ! Je vais maintenant vous masser les doigts, chaque doigt. Vous avez le droit de manifester votre volonté, car la volonté habite vos membres et que je ne veux pas faire ce que vous ne voulez pas. Montrez-moi votre volonté ! Vous le pouvez ! » Elle ne me répondait pas, mais je savais qu'elle m'entendait. À tous mes soins, je lui racontais le monde, ce qui se passait dehors, les événements beaux comme ceux qui sont terribles. Je la réintégrais dans le monde et son action. Je lui parlais aussi de sa vie que sa famille m'avait donnée de récits vivants, qu'elle avait vécus. Bien au-delà, je la reliais à son incarnation passée et sa destinée. Qu'avait-elle décidé pour elle ? Qu'avait-elle voulu fuir si elle avait voulu fuir !? Je lui posais des questions. Elle entendait, l'âme restée au-dessus de son corps. Elle m'entendait. Elle ne réagissait pas, mais je savais qu'elle m'entendait. Je lui disais aussi que sa liberté était pleine et que je n'agissais que dans l'accord des êtres garants de sa destinée, car chaque matin, je demandais leur accord. Je lui disais qu'elle pouvait revenir habiter son corps comme continuer à le refuser, et que je n'étais plus que celui qui maintenait la sève circulant jusqu'à ce qu'elle quitte la vie terrestre. Je ne l'obligeais à rien. J'étais son passeur, de quelque manière qu'elle choisirait de passer d'en bas vers l'en haut, si cela avait été son choix. Je ne faisais rien qui puisse manquer de respect à ce temple alité dans ces draps blancs. Elle était son temple et son temple était adoration dans le silence recueilli. Puis, je lui parlais des êtres garants de sa vie. Je lui décrivais ce qu'ils étaient. Je lui parlais de mon ami dans l'azur éclatant où le regard peine à aller, tant il est éclatant de lumière. Je lui décrivais sa puissance resplendissante qui ne décide rien, celle qui attend notre consentement. Chaque jour, je lui parlais de mon ami de l'azur bleu dans son ciel jaune, riche de sa chaleur d'aimer. C'était comme l'apothéose du soin qui reçoit le geste qui agit et sauve. Il n'y eut pas un jour où je ne lui parlais pas de mon ami. Il était là. Il était là parce que j'avais la conscience du temple et que le temple est son temple. L'amour était agissant. Il emplissait le geste, la parole et la sève circulante. Il s'adressait à elle. Il était pour elle.

- J'ai vu tout ce que tu as fait. Tout à l'alentour brillait d'un éclat sans pareil car la terre est plus riche d'abîme que des actes d'amour. Tu as offert la quintessence du don sans rien demander en retour.

- Trois mois m'a-t-il fallu pour le réveil de son matin, un matin de printemps de soleil chaud dans la floraison renouvelée des fleurs. Voit-on vie végétative renaître de ses cendres que vie inscrit sa demeure éternelle dans le temple qu'est le corps. Un matin de printemps, alors que j'entrais dans sa nature pour aider à la mobilité renouvelée de son corps, j’écarquillais les yeux de surprise. Elle était là, toujours alitée dans ses draps blancs comme la neige de l'hiver qui a achevé sa mission pour son printemps éloquent. Elle ouvrit les yeux et bougea sa tête, me recevant d'un « oh ! » qui me reconnaissait. Je la vis sourire. Une larme coula le long de sa joue gauche. Elle ne dit mot davantage. Elle était présente. Elle avait réintégré son temple :« Bonjour, Madame, dis-je. Je suis Jean, Jean Christophoros de Lebenkreutz. Je suis celui qui a œuvré à votre retour et béni votre vie. » Elle sourit large comme le fait le levant à l'aurore. Fatiguée de ce retour, elle s'endormit de ce sommeil qui n'est plus inconscient, mais de ce sommeil réparateur qui prépare l'instant à venir.

Un mois plein, je pus m'entretenir avec elle. Je n'agissais plus dans l'oubli. Elle répondait à ma parole. Puis, un midi, je la vis écarquiller les yeux, manifestant une transcendance qu'elle vivait dans le silence qui n'arrive pas à exprimer la force de ce qu'elle voyait. Son regard tournait tout autour de ma tête, dans ce regard admiratif qui aurait voulu dire son verbe. Je lui dis : « je sais qui vous voyez madame Temple ! Je vous présente mon ami de l'azur étincelant des matins enflammés qui prend en lui tout l'amour qui va de vous à moi, de moi à vous. ». Il était là. Je Le sentais. Je Le vivais.

Elle vécut un mois ainsi dans la joie de vivre, même alitée dans ses draps blancs. Puis, un autre matin, elle décida en ma présence de quitter la terre pour rejoindre son firmament. Elle tendit la main vers moi, le visage tendu à l'extrême et s'éteignit. Juste avant de mourir, nous avions chanté ensemble, une chanson qu'elle aimait. Depuis, elle ne me quitte plus, active du haut de son ciel, pour protéger mes jours.

- Diras-tu que ce fut un miracle, Jean ?

- Non ! ce ne le fut pas.

- Dis-moi pourquoi !

- Ce que j'ai fait, chacun peut le faire.

- Dis-moi encore pourquoi !

- Ce fut un travail de longue haleine, doublé d'une foi sans bornes. Je croyais en ce que je pouvais réaliser. Je croyais en elle, en moi et en mon ami du pays du ciel bleu, devenu jaune par sa seule grâce. Je croyais dans les forces de l'amour. Je crois en les forces de l'amour. Je n'ai jamais douté une seule seconde, jamais ! Puisque j'avais ton accord, celui de son ami et de ton ami dont l'amour est puissance et vie, je pouvais le faire. Puisque j'avais vu cet amour infini m'enveloppant et le monde, chacun et tout, je ne pouvais que vivre son intériorité pour être à son image. Il n'y a aucun miracle, car confiance et amour ne sont pas des miracles. Tu sais que mes témoins ne furent pas témoins de mes paroles, seulement de mes actes. Si ils avaient témoins de mes parole, de la parole, je n'aurais pas pu agir. Ils regardaient et disaient que j'étais un doux rêveur, ce que j'acceptais sans leur dire que je n'étais pas un rêveur mais une conscience en action. Lorsque madame Temple se réveilla de son long coma, ils entrèrent dans la chambre comme cabris sautent dans la nature, heureux et naïfs, et dirent «  Vous aviez cru Jean ; vous y avez toujours cru ! » Foule se déplaça vers le lit blanc pour constater ce doux retour, se mit à m'adorer. Aussi, partis-je loin pour ne pas être adoré car ce n'était pas moi mais Lui en moi pour Lui.

- As-tu fait cela souvent, Jean ?

- Chaque fois qu'un être souffrait d'une intensité incommensurable ! Tu le sais, tu l'as vu ! Chaque fois qu'un être était condamné et que je me savais avoir le droit d'agir ! Chaque fois qu'un homme était dans la moquerie des hommes, je l'ai fait ! Je le fais car il m'insupporte de voir et d'entendre les sarcasmes. Aussi car, je participe au monde dans l'amour pour son harmonie. Je ne supporte pas que destinées soient raillées dans leurs malheurs. De nombreux hommes pourront témoigner. Ils n'ont pas compris ce que je faisais, mais ils ont vu et constaté. Pour cela, sur mon sentier, j'ai agi en de nombreuses villes et villages pour que les témoins ne soient jamais les mêmes. Un témoin est un futur passeur. Un sentier est toujours doublé, dans sa méditation, d'actions. La méditation seule est un chemin mort si elle n'est pas l'amie de l'action.

- Comment as-tu appris cela ?

- J'ai, un jour, rencontré un maître qui dans mon intime rencontre, m'a demandé de ne pas rester sur son enseignement sans le vérifier par moi-même, alors ce fut la seule de ses paroles que je n'ai pas vérifiée car j'ai vérifié toutes ses autres paroles. J'ai su qu'il m'avait dit la vérité parce que je l'ai aimé tout de suite dans notre rencontre et que l'amour ne doute pas de lui-même. Il était beau comme le soleil qu'il témoignait. Son regard habitait tout l'espace. Son verbe était aussi souple qu'un morceau de soie dans l'âpreté de la roche qui me bâtit de volonté. Il m'avait prévenu des difficultés que je rencontrerai. Il m'avait assuré que je passerai le sentier, malgré les attaques nombreuses du serpent. Je l'ai vu de nuit. Il est venu me voir. Son nom était une pierre de fondation sur laquelle nous bâtissons l'avenir. Qui prend le sentier rencontre toujours un maître témoignant de l'amour parce qu'il est amour et agit conformément à sa parole donnée. Avec lui, j'ai vu l'amour personnifié. Je ne pouvais qu'en témoigner à mon tour. C'est mon seul miracle : cette rencontre écrite depuis la nuit des temps, pour l'éclat du jour !


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Court extrait

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

Ô, mon ami, aux cheveux de lumière ! C'est ton laurier en germination croissante que je vois d'un vif éclat orner ma chevelure, enfin ! Tout est si sombre dans ces nuits gelées qu'il faut bien que les colonnes éclairent les ténèbres pour que scintille ma robe en plein minuit du midi au firmament ! Combien d'esprits étincelants vêtent ces nuits sombres pour que je sois saisi par la gelure de décembre afin de mieux marcher en mon cœur réchauffé ! C'est mon aurore, en ces nuits, enfantée par douze êtres majestueux dont je devine les mille yeux forgés d'éclairs dans leurs ailes étendues. C'est cela l'hiver, cette chaleur tout intérieure qui va, en silence, son serment promis à mes pas. Je les vois créer la lumière dans les nuits déployées tel mon drap de soie que ma pelisse et mon voile prennent avec elle.

 

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Puisé au hasard de mes pages écrites du Sentier...

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

La lumière enfante la nuit parce que c'est la nuit qui apporte la lumière et qu'elle veut que nous le sachions. C'est pourquoi la nuit existe. Loin de tout ce qui pourrait lui nuire, elle se crée, là, où je peux la recevoir, sans fragilité, sans blessure, rien que vêtue de sa splendeur dans sa chaleur d'aimer. Je l'aime comme elle m'aime, car elle se multiplie et amplifie mon tout dans son esprit. Elle est moi. Je suis elle. L'une dans l'autre. Je suis le « je suis », car le « je suis » est plus fort que tous les désenchantements. Oh ! Que j'aime ! Mon aurore ouvre mes mains. Je les tourne vers son offrande immuable. Elle est un lever sans fin que j'adore de mes yeux éclos, hébergés par mon adoration à sa chaleur vécue. Qui a vu l'aurore éternelle sait sa beauté infinie. Qui a ressenti son enveloppement connaît son origine. C'est ainsi. Je ne peux grandir entre mes deux piliers que si je vais de loyauté dans leur profondeur, et qu'issue de la lumière du monde, la lumière du monde agit dans ma propre clarté. Je marche entre les deux colonnes de marbre blanc dont je remarque la transparence comme d'un cristal. J'aime. Elles chantent et leur chant révèle la coupe de sons argentins qui est son avenir. La coupe s'élève dans le firmament. Le cristal nourrit sa note dans un flûté aigu des plus purs que l'harmonie des sphères anoblit. J'ai vu la coupe. J'ai entendu sa cérémonie. J'ai vécu sa plénitude. C'est, là, juste entre mes trois colonnes. Les douze nuits aiment à la cime de leurs cordes cristallines, et je suis. Je suis. Je suis, le vent, la respiration et la mélodie. Je suis le jour d'une nuit, pour moi, à moi. Je marche, seul, entre mes colonnes de marbre blanc, blessé d'avenir, parce que la coupe déverse son suc et qu'elle le sait. Si j'ai animé douze marches avec mon tendre ami aux cheveux dorés comme la clarté de l'aube, les colonnes que je vois se sont bâties sur les douze qu'il a descendues, marche après marche, pour ces nuits sombres, couronnées de gloire. Le cristal a laissé retentir son essence. Le zéphyr a chanté avec lui. Je marche. Qu'importe à cet instant que je sois pieds nus ou pieds habillés, car mes pieds me portent hors du sol. Je vole d'ailes et je vois les éclairs apporter leurs espérances. C'est d'un infini élan que je vais, là, où peu encore vont. Et mon ami accompagne son ami venu du zénith bleu comme l'océan, jaune comme le cœur des fleurs au printemps, parce que nul ne laisse un ami en chemin. C'est comme un cercle mouvant dessinant son aura de tendresse et de reconnaissance à la souveraineté du geste grave. C'est le Devakhan qui me le dit en cet instant pour cette sublime réalité. Je marche, et de mes pas légers, je suis le monde, car je suis les deux colonnes qui guérissent ma colonne. Un flux de lumière élargit mon centre et mon centre exprime sa volonté du haut vers le bas et simultanément du bas vers le haut. Je suis une croix perlée de douze nuits.

 

Profession de foi de Jean de Lebenkreutz dans "le sentier"

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

Oeuvre personnelle BLJ "invisible" auto-portrait

 

Je ne mordrai pas la terre, c'est grâce au Soleil ;

Le nez vers le voile à Saïs se tenant au ciel.

Je ne rongerai pas les os, ni mon cadavre,

La face tournée vers l'azur, céleste havre.

 

Je ne tomberai pas sous le joug des faussaires,

La vue éclairée par la pensée qui marche d'air.

Je ne ferai rien de contraire à mon altruisme,

Le cœur épris de vertus, et de très forts truismes.

 

Je braverai la terreur, grâce à Vérité,

L'acte divin que mon geste est en déité.

Je ferai du monde l'éclat de Sa noblesse,

Aidant toujours l'indigence, et la faiblesse.

 

Je me cacherai d'aide, sans réels tourments,

Sans témoin terrestre, mais céleste serment.

Je ferai du geste la grâce de mon Verbe,

Toujours enveloppé(e) par le linceul superbe.

 

Je me moquerai de toutes les cruautés

Qu'hommes font pour humilier la lucidité ;

J'irai avec force-marche braver l'indécence,

Prenant pour Lui dans mes bras mes pires souffrances ;

 

Je ne mangerai pas la glaise pour un seul,

Aussi noir que sa vue espère mon aïeul ;

Les enfants de l'Esprit, et mes mortes entrailles,

Que seule ma vie garance de vraies batailles.

 

Je ne taillerai pas mon Arbre, mon Vaisseau,

Car de Vie Il vogue et croît de savoir mes Sceaux.

Je ne couperai pas mes jolies branches mûres

Pour des perfidies mortes à ma robe de bure.

 

Toujours, vous me verrez dans la clarté de ma foi,

Actant, pourtant invisible, pour mon Cygne au bois,

Reniant le geste qui tue, l'aide en bandoulière,

Sauvegardant le noyau Humain, mon beau lierre.

 

Partout où règne le mensonge, ce terrible ! 

Je me tiendrai debout, infaillible, invincible,

La Bouche à double tranchant comme Témoin,

Pour que l'ombre n'atteigne jamais mon Oint.

 

Je ferai de Sa grâce ma lutte, toujours,

Pour qu'en Moi, pour Lui, resplendisse l'Amour,

Ce Fidèle infalsifiable que j'adore,

Que nul ne peut salir pour Sa coupe, mon Amphore.

 

Je proclamerai Son Nom dans chaque acte,

Visible dans l'Invisible se manifestant à Pâques

Et je ne tremblerai point devant la face des contraires,

Ne tremblant que devant la Face de l'Oint, en prière.

 

 

Extrait du sentier

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

Mon ami me regarde et dit :

- Tu as vu l'Orient.

- J'ai vu l'Orient.

- L'Orient a imprimé en toi ses sceaux.

- L'Orient a imprimé ses sceaux en moi.

- Tu as vu son autel.

- J'ai vu son autel.

- Tu as vu sa coupe.

- J'ai vu sa coupe.

- Tu as vu ses colonnes.

- J'ai vu ses colonnes.

- L'or ruisselle entre elles.

- L'or ruisselle en moi.

- La nuit est une aurore.

- L'aurore éteint la nuit.

- Tu as allumé ta flamme.

- La flamme brille en mes jours.

- Tu gravis douze marches.

- Je vois mon éternelle demeure.

- Tu es ta demeure.

- Je suis ta demeure.

- Tu es ton avenir.

- Je suis ton avenir.

- Les fleurs chantent.

- Elles sont ma couronne.

- Les roses t'ont griffé.

- Elles m'ont aimé.

- Tu as baigné tes pieds à la source.

- La source m'a purifié.

- La peur, tu as rencontrée.

- Je l'ai vaincue.

- Le cristal a chanté.

- J'ai entendu sa pureté.

- Comprends-tu pourquoi tu ne fus pas aimé ?

- Car l'amour est don.

- Il consume.

- Il me renouvelle.

- Hommes ont peur d'être consumés.

- Ils ignorent l'amour.

- Tu l'as vu.

- Je l'ai reçu.

- Hommes ne t'ont pas cru.

- Sages n'étaient pas de sagesse.

- Ils auraient pris ce don en eux.

- S'ils l'avaient été, ils m'auraient vu.

- Ils étaient de faux sages.

- Nul ne parle d'amour s'il ne l'a vu.

- Il ne parle plus.

- Il le témoigne.

- Tu marches.

- Je vais.

L'amour est une flamme qui nous embrase. Je ne peux être Phoenix que par la brûlure du feu qui transforme l'amour pour mon frère en amour du monde pour lui-même. Le saviez-vous ? C'est l'aurore éclatante du matin levant ses mains sur nos têtes. C'est le crépuscule enflammé du soir relevant le fruit de notre jour pour son lendemain. Je suis Phoenix. Je m'offre au feu intérieur ; et, mon ami de l'azur bleu comme les océans, jaune comme son ciel, ouvre ses bras dans ma croix perlée de douze pas réalisés. Les nuits s'achèvent. Tant de nuits pour une seule aurore ! Tant de fleurs pour un seul parfum ! Tant de pierres sur mon chemin pour une seule évidée devenue mon vase dans l'amphore du monde ! Tant d'étoiles au-dessus de ma tête pour une seule devenue mon sentier ! Je la vois. Elle est là, dans sa superbe, mouvante dans mon ciel, brillante comme un cristal dans l'âtre créateur des astres. Vénus épouse Jupiter. Alors que la nuit est noire, telle une obsidienne céleste, elle éclaire le ciel d'une aurore à minuit en décembre. Puis, lentement se profile un violet pourpre intense que je regarde d'une félicité pleine. Ciel noir sans lune devient vert émeraude et sa diaphanéité, dans sa limpidité, illumine mes pas sur le sentier pour que jamais je ne doute de son jour après la nuit. Je suis immobile dans le silence des recueillements qui raconte combien cette merveille m'emplit de béatitude. Ciel embrasse toutes les teintes de jaune, de l'orange chaleureux au rouge clair d'un feu bouillonnant. L'étoile grandit. Elle est une force tranquille qui va entre les falaises de ma vallée au repos. Douce, majestueuse et généreuse, elle bouge dans mon ciel qui, à cet instant, brille pour moi dans la solennité de ma nuit. J'ai trente-trois ans. Alors que je pense que j'ai une chance inouïe de voir l'étoile de minuit, l'étoile semble me dire de la suivre. Je la suis du regard, les yeux levés, l'âme élevée. Je savais qu'elle pouvait être vue par les âmes parties sur le sentier, mais j'ignorais que je la verrais dans sa splendeur. Je l'ai vue. Je l'ai embrassée. Je l'ai prise en moi. Oh ! ciel émeraude, limpide comme une source jaillissante, qu'écris-tu en moi à cette heure ? Et, je vois en son sanctuaire, une spirale de lumière au-dessus d'un autel de pierre en marbre blanc, coiffé d'un superbe voile de soie immaculé. Je tends la main vers le firmament, gracile et recueilli, et surtout, surtout ! émerveillé toujours ! L'étoile est si mobile dans le ciel qu'elle m'offre son ascension.

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