Béatrice Lukomski-Joly


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Le cloître des roses

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

TOUTES PHOTOS PERSONNELLES : fleurs de mon jardin

 

Dans la nuit éclairée par un clair de lune d'hiver,

Je me suis promené. L'heure était fort tardive.

Habillé d 'une simple redingote et d'un pull-over,

Le mocassin traînait la semelle sur la terre gélive.

 

Transi comme on peut l'être une nuit d'hiver,

Les pas arpentant la froidure, la tête enrobée de gel,

Je marchais comme on peut marcher sur du verre.

Quand glace et flocons crissants de pas de danse irréels,

S'amarrèrent à l'herbe emmitouflée d'une vie singulière,

 Je vis dans la nuit noire une porte clairsemée de lumière.

Bée ouverte, invitant mon désir des marches palières,

Je vis un mur : une abbaye enrobée de belles meulières !

 

 

Etais-je si gelé que ma vue faiblissait sous le vent glacé ?

Pendant que l'air intempéré figeait les perles de ma sueur,

Je me pris à aimer la nuit, la nuit et mes yeux gelés.

Faut-il marcher des pas pour ouvrir une porte ouverte d'heures !

 

Bien ! D'évidence, je scrutais la porte de lumière,

Toujours bée ouverte dans la nuit de la muraille vieille.

J'avais froid sans avoir froid ! Curieuse sensation d'hier !

Un passant vint de je ne sais où, clamant le riche éveil.

Je vis dans l'épais manteau glacé une ombre ventilée,

Une branche de rosier clamant sa nature d'étincelle

Et encore une fervente colonne de moines flagellés.

Est-ce que l'hiver avait ainsi habité leurs crécelles ?

 

 

Je regardais, ébahi, l'empreinte de mes pas dans le gel,

La porte bée ouverte, la lumière dans le mur de meulières,

Les flocons valsant dans l'air téméraire sur une margelle

Et les moines cagoulés, aux plaies suintant la prière.

Je m'approchai de la porte bée mais étroite de rudesse,

Que moines défirent leurs cagoule, montrant le feu,

Le feu et la rose des regards arpentés par la sagesse,

La sagesse et la douleur des pas allégés, radieux.

 

 

"Pas de perles aux pourceaux, ni de roses à l'âne qui dort !"*1

La porte dévoila un immense voile bleu son pas franchi,

Couvert d'yeux sur ses ailes et d'une trompette d'or.

J'étais invité à gravir la margelle des pas affranchis.

À peine fus-je entré dans le sein de la dame voilée

Que le froid m'assoupit, alourdit mes paupières.

Le monastère montra une tour curieuse et scellée.

Lacunes et désespoir hurlaient derrière les meurtrières.

Deux Lux solis vel laus semper*, aux murs des gelures

Me fit le diligent des ânes en perdition, me hissant haut

Malgré les blessures des moines mariées à mes engelures.

Sept cordes me furent jetées pour nous sortir du chaos.

 

Je me serrai dans ma redingote et mon pull-over,

Laissant ma semelle batifoler avec l'herbe silencieuse

Dans la nuit éclairée d'un clair de lune d'hiver.

L'heure semblait s'être figée à la porte sentencieuse.

Bien ! J'avançais comme on peut dans le froid cinglant,

Les bras cernés d'émois aux vents terribles de la nuit.

C'était comme manquer d'air dans l'air des gels vivifiants.

J'avais franchi la porte claire d'une torche de moine à minuit.

J'aimais l'épaisseur des murs de pierres du monastère.

J'arpentais enfin son cloître, les pas guidés, le gel chaud.

J'avais quitté la tour et la tour me coucha par terre !

Avais-je donc si froid sans que j'eusse froid, ni chaud ?

 

Arpentant inlassablement le cloître fleurant bon la rose,

Je vis quatre voies. Mais laquelle prendre avant d'avoir pensé ?

La première, courte et périlleuse, semblait grandiose

Mais assurément ascétique me fit la refuser à la lumière rosée.

La seconde ne me sembla guère mieux, longue et sans détour,

Terrible de lenteur, sans embûche, sans douleur, sans gel,

Me parut si ennuyeuse qu'il me fallut fuir cette vue de la tour.

Je préférais marcher dans le froid, vers la porte dorée d'appel.

La troisième me parut fort adaptée. Ce fut celle que je choisis.

Arpentable, riche de beautés dans la lumière acquise du gel,

Mes pieds endoloris portés par la caillasse fracturée des vies

Me semblèrent avoir pris le bon chemin, me portant d'ailes.

Quand à la quatrième voie, si dangereuse, tant elle consume,

Ne me sembla pas être de richesse, le corps corruptible.

Les moines dirent qu'il me fallait délivrer la colombe plumes

Pour que plus jamais le corbeau n'attaque sa face sensible,

Ne plus jamais dévier de la voie royale du cloître des roses

Que rosiers fleurissent dans la nature des valeurs d'hiver

L'hiver passé au cou des sentiers insalubres que l'hiver pose.

Ainsi, je fus ravi devant la porte de lumière dans la nuit d'hiver.

Je continuais ma longue promenade au clair de la lune pleine,

Abrité maintenant des murs du monastère au clair du cloître

Et de ses roses, la neige ayant enfin réchauffé mes pieds

Que mes pieds encore se souviennent de leurs pas . Croître !

 

 

Là, une autre porte apparut, terrible, tout en étant gelée

Que mes doigts furent brûlés du gel de l'hiver en partance.

Nous n'avons pas toujours froid au bon moment me dit l'été.

Il peut geler en plein soleil si tu ne gardes pas l'élégance.

 

Bien ! Je veux bien avoir froid si l'hiver donne son fruit.

Je veux bien être aimé des morsures du gel à ma noce

Si le temps acquiesce ma venue à la voie royale de la vie !

Préparez la grande salle et la grande table avec la crosse.

Ne suis-je pas l'élève des princes cultivant la roseraie d'été ?

Cependant, ici, je perçois tant d'erreurs de la pensée

Qu'il me faut me parer de prudence, préparer ma pesée

Et mesurer ce que j'ai souhaité oublier, pour mes rosacées.

 

Qui arrive au cloître des roses dans la lumière adamique?

Qui invite, des promeneurs aux pieds abîmés, au repas ?

Une resplendissante jeune fille sous le son des musiques

Et des trompettes éblouissantes, retentissantes, au trépas

Devenu vie sous le gel envolé des pas faits par milliers !

 

La porte devient chaleur et je marche, je marche des pas,

Je gravis des marches palières, je franchis des murets.

Et des murs géants se dressent devant moi, à lents pas.

Des roses par vases centuplés ornent la grande salle.

Trois groupes de moines se présentent. Je suis avec eux.

J'ai froid. Mes pieds gèlent. Ma sueur perle sur les dalles.

Pas cette pesée ! Indigne ! Tellement indigne d'Elle et d'eux.

 

Qu'ai-je fait de mes vies en mes pas glacés pour oser demander ?

Le froid m'habite toujours et ma redingote ne me réchauffe plus !

Mes engelures suintent l'irrévérence et je suis là à espérer !

Je ne mérite pas d'être pesé les poids d'or aux plateaux si durs !

Six sentences ! Et Elle, dans la lumière si belle !

Six anecdotes , tant d'énigmes et si peu de réponse !

Si peu méritant ! Tellement indigne dans cet appel !

Elle me dit de venir et je vais vers les roses ,leurs ronces,

Le visage baissé, la figure suppliante à ses demandes.

 

 

Là, je m'arrête, indigne, les pas griffés par le froid.

Le cœur porteur de chaleur, j'ai vu la porte, la tour,

Les oiseaux noirs terrassés par les colombes des bois.

Je marche dans la nuit des forêts ourlées d'étoiles secours

Que le clair de lune enlumine d'or à sa robe garance,

Sa couronne de laurier et ses lumières de jour suspendues.

Allongée dans l'herbe immaculée, je vais dans le silence,

Le sourire allongé aux froids de l'hiver, printemps devenu.

 

*Dieu lumière du soleil,  

*1 CRC

 

Classé dans : Poésies Mots clés : Spiritualité,

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Béatrice Lukomski

 

Livres publiés :

1 / Âmes amères - chez GABRIEL LARDANT Hauteville-Lompnes Ain 1984  - épuisé - 

https://booknode.com/ames_ameres_0991345

2 / Le Génie - Théâtre-  chez GABRIEL LARDANT Hauteville-Lompnes Ain  1990 - épuisé -  Aujourd'hui Livre d'art, de collection.

https://booknode.com/le_genie_02246894

3 / Poèmes solaires, poèmes lunaires - Aux éditions du Bord du Lot 2017

http://www.bordulot.fr/detail-poemes-lunaires-poemes-solaires-256.html 

4 / Le sentier - Roman - 2019

5 / Lumière et ténèbres - Poèmes, Conte,  Nouvelles -2020

6 / La table dressée et le Roi - Conte - 2021

7 / En l'an trente-trois de mon âge - poèmes et prose - 2022

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