20 janvier 2021 - Alzheimer
Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentairePhotos non libres de droit
20 janvier 2021
Elle est là... la sanctification du Nom dans l'âme.
Trois heures trente du matin. L’aube est encore voilée, et là où elle vit, l’aube est permanente attendant son midi avant de briller. La lune accapare la lumière. Tout est ombré. C’est semblable à un brouillard à peine délié de son trouble terrestre. La lumière perle au travers d’un rideau qu’elle tente de soulever, le faisant porte pour que je la vois, accompagnée d’une autre multitude ailée qui permet cette visite et sans laquelle, rien ne serait possible. La multitude choisit l’heure, le moment entre deux sommeils qui réanime le sommeil conscient en perçant la limite du rêve et de l’éveil.
J’ai soif, je me réveille, je bois, je me rendors. J’ai froid, je me réveille, je ramène mon édredon sur la poitrine et me rendors à nouveau. Je rêve , je trouve le rêve beau, il me réveille, je l’écris, et me rendors. J’ai à nouveau soif, je me réveille, je tends la main, je bois, je me rendors. Mon chat miaule, il me réveille, saute sur ma hanche, je regarde l’heure, il est quatre heures du matin, je me lève sans savoir pourquoi et me recouche, estimant un peu étrange ma nuit saccadée, mais jamais inquiète. Une demie heure pour ce ballet nocturne inattendu ! Je suis sereine. Mon chat se dresse, se redresse, regarde vers l’entrée, les yeux fixes. Je me relève et me recouche, laissant le chat reprendre sa place sur ma hanche. C’est donc cela le geste de la multitude ailée, préparant une rencontre entre deux mondes pour que la rencontre puisse se faire ! Faire en sorte que je ne sois ni éveillée, ni endormie, juste entre deux mondes, entre deux éthers, consciente, sans rêve, ni étourdie ni pleinement réveillée, juste somnolente, mais là, pareil à l’instant où nous sentons que nous allons nous endormir, le corps tressaillant un peu.
Je connais bien ces moments précis où le corps physique dit qu’il va laisser aller ses corps spirituels avec cette impression que la terre tourne autour de soi dans un vertige impressionnant. Un sursaut comme une branche se détache de son arbre. Je suis confiante et ne m’attends à rien de précis, quoique le chat fixe toujours l’entrée et m’alerte d’une présence invisible qu’il voit. Je laisse le chat à sa contemplation. Il est serein. Je remonte l’édredon sur ma poitrine, pour la troisième fois. Mes deux autres chats fixent aussi la porte. Je leur dis :" oh ! laissez-moi dormir !" Rosalie, grise et striée d'un beau poil lustré, semble plus attentionnée et je réalise que ce chat était le sien et que j'ai vu une seule larme couler de chacun de ses yeux quand je l'ai recueillie, se blottissant dans ma main, ce qui m'avait fort peinée, consciente de son chagrin d'âme animale. Mais, présentement, je n'en fais cas, habituée à ces mouvements de chats qui s'étonnent et réagissent à l'invisible.
Quelqu’un frappe à la porte. La porte s’ouvre en apparence, sans mouvement. Quelqu’un appelle.
"Tu es là ? Es-tu là, ma fille ?
Je reconnais cette voix intérieure que le physique ne manifeste pas, que seule la conscience exprime. Elle franchit la porte, passant à travers. J’écarquille les yeux. C’est bien elle ! Elle est là devant moi et je l’accueille le cœur ouvert comme on ouvre les bras sur terre. Seul, le signe diffère. En bas, nous ouvrons les bras pour accueillir un être aimé ; en haut, nous ouvrons le Cœur et le Cœur chante dans le regard spirituel qui n’a plus d’yeux physiques et pourtant voient. J'ignore si cela est pareil pour chacun, c'est à dire si beaucoup ont le cœur éveillé. Mon Cœur s'ouvre comme deux bras fraternels. mouvement indescriptible en notre langue terrestre. Je me regarde dans mon lit, endormie, souriante, et comprends que je vois avec mon corps spirituel bien éveillé.
Elle me montre en un déferlement d’images tous les moments heureux vécus ensemble ses trois dernières années, disant merci, simplement merci, et pensant à chaque image : « Là aussi, c’était beau ! »
C’est si rapide que j’en ai le vertige. Il me faut penser vite le temps, car le temps n’est pas le même en haut et en bas. Pour moi, c’est un vertige, car je ne suis pas morte ; pour elle, c’est une lenteur. C’est sa nouvelle normalité. Chaque scène s’habille des vêtements portés lors de l’instant-souvenir, et vont à rebours, du plus récent au plus ancien, pour moi aussi ; tous s’ornent des environnements et objets qui ont reçu nos présences. Je pourrais toucher chaque image pleinement animée, profonde comme si l'espace terrestre était semblable à celui spirituel parce que c'est un souvenir terrestre, inversée, si je le voulais, tout en sachant que je n'ai qu'à vivre le moment dans cette nouvelle éternité, et chaque image s’éloigne pour laisser sa place à une autre tout aussi vertigineuse. Je comprends, revenue au matin, que voir inversé n'appartient pas qu'au monde des défunts mais bien aussi au monde de la clairvoyance. Le monde originel ne se manifestera jamais en un langage terrestre, il est le langage des origines.
Le panorama qu’elle voulait que je vois dans sa gratitude manifestée s’efface. Elle s’assoit sur mon canapé rouge, près du piano, et je la vois être telle elle était chez elle, recroquevillée, dans l’attente, triste, le regard éteint dans sa présence semi-consciente. Je n’ai de cesse de lui dire, enjouée, et heureuse, ô combien ma joie est grande de la voir et de la remercier d’être venue, allant jusqu'à lui demander comment elle va, ce à quoi elle ne me répond pas. Elle parle peu. J'ai aussi envie à cet instant de lui demander ce qu'étaient ces voix physiques qui la harcelaient dans ses hallucinations de la dégénérescence cérébrale et me retiens, car ce n'est pas l'heure. Je sens derrière moi la multitude ailée qui ne se montre plus mais qui me laisse comprendre qu’ils sont là. Ils sont les acteurs de l’instant de la rencontre. Sans eux, rien n’aurait été possible. C’est comblée de grâce que je remercie chacun et tous pour cette merveille. Mon sourire est aussi vaste que le ciel ouvert et je lui redis que je l’aime. Elle ne parle pas. Elle ne sait que montrer des images de vie avec leur contenu précis. La multitude ailée pense en moi. Je comprends que la rencontre va s’achever. Le temps rapide de lui manifester encore et encore mon amour, de lui demander de revenir me voir, d’ouvrir la porte, à la multitude ailée de ré-accomplir le processus, et je Les remercie d’avoir permis d’établir le lien, de mes yeux spirituels vu. Je comprends soudainement le processus de la Volonté. le mot devient vie ; il n'est plus concept.
Je regarde mon corps endormi, et sans conscience, regagne mon sommeil. La multitude ailée l’a voulu ainsi.
Elle est là... la sanctification et la Volonté du Nom dans l'âme. Moi aussi.
Au petit matin, je me souviens de tout et flotte comme si sa présence était encore là, elle est là, mais je ne la vois plus. La multitude ailée a fermé la porte, descendu le voile, en attente d'autres moments. Quand ?
Je lis : Rudolf Steiner que je remercie en pensée de m'être laissée éveillée par sa Pensée.
Depuis, Rosalie dort le jour sur l'emplacement où elle s'est assise, et fixe de ses yeux ronds l'invisible, pour revenir la nuit se blottir dans l'édredon gonflé de plumes pour être avec moi.
* la Hire : http://www.jeannedarc.com.fr/centre/vignolles.html
La force d'une plume est de permettre à l'oiseau de planer au dessus des nuages...
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Jeanne, extrait de Lys & Love de Laurent Voulzy, disponible : https://LaurentVoulzy.lnk.to/LysetLoveID