Discours entre la Conscience et le Soi "à propos de la peine de mort"
Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaireTableau "L'échelle de Jacob" de William Blake
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La Conscience
Je voudrais t'entretenir aujourd'hui de la peine de mort. Voilà des siècles qu'elle ballotte la pensée des hommes et qu'hommes ne trouvent pas la réponse à sa réalité. Les hommes oscillent entre la donner ou l'abolir. Certains sont assurés qu'elle est utile et qu'elle ne doit pas être supprimée, ou n'aurait pas du être supprimée ; d'autres applaudissent à ce qu'elle fut révoquée en certains pays, pas chez d'autres. Elle fait couler beaucoup d'encre et je voudrais faire couler à mon tour la mienne sur sa corde et sa chaise.
Le Soi
Je t'écoute.
La Conscience
Depuis que j'ai eu, petite, la connaissance que la peine de mort existait, toujours j'en ai été attristée, mieux ! atterrée. J'en étais blessée car elle me semblait inconciliable avec la vie et l'Amour de son prochain.
Le Soi
Tu as pensé très jeune !
Mais tu me parles d'amour du prochain ! Aimes-tu celui qui commet le pire ?
La Conscience
Oui ! tu le sais ! Ne te l'ai-je pas démontré ? Passons ce que j'ai prouvé au Monde à mon échelle propre ! Tu te souviendras seulement des couteaux lancés vers moi et des visites faites à mon persécuteur ! Mon persécuteur a transfomé son âme, seul cela est resté en ma mémoire.
Le Soi
Oui !
La conscience
La Conscience n'a que l'âge de la pensée que nous avons bien voulu mettre en action. Certains disent qu'elle apparaît à l'âge de sept ans et je le pense vrai à ce que j'ai vu, mais en ce qui me concerne, non ! J'ai su penser dès que j'ai possédé le langage. Cela inquiétait mes parents car ils disaient : « Que de souffrances à cette âme lorsqu'elle sera adulte ! ». La seule chose qu'ils ne mesuraient pas est que c'était déjà souffrance car avoir conscience est, soit une tristesse, soit une joie. Il ne faut pas croire que conscience est dénuée de sentiments dans le raisonnement. Je me suis incarnée en sage et la sagesse a inquiété les hommes. J'étais mal vue et les hommes rencontrés m'ont reléguée à la stupidité. Il en est toujours ainsi.
Le Soi
Oui ! Conscience est chemin vers Moi. Conscience n'est jamais l'amie de sa stricte contemporanéité lorsqu'elle est l'embryon d'une époque. Elle est la conscience de notre humanité. Plus tu réfléchis le monde, plus tu me deviens et plus tu t'affranchis des anciens sentiments pour en élaborer d'autres que tu maîtrises. Conscience est chemin vers la maîtrise de soi et la connaissance de ce qui est juste.
Peut-être souhaiteras-tu savoir ce qu'est la la relation avec le juste !
La Conscience
Je sais que le juste est l'humain, et ce qu'est l'humain. C'est la pensée en l'homme qui a trouvé l'Amour.
Le Soi
Bien ! Allons ! Cheminons ! Qu'en est-il aujourd'hui, les décennies franchies ? Ton questionnement sur la peine de mort m’intéresse dans ce que tu vois en moi d'humain.
La Conscience
Je n'ai pas changé d'avis ; toujours, elle me semble injuste. C'est bien un de mes cheminements dans lequel je n'ai jamais changé ma pensée. Pourtant, j'ai vu bien des drames.
Le Soi
Explique-moi ! Si tu élabores un dialogue hugolien, je me retire, car Victor Hugo a tout dit à son sujet. Engagerais-tu un combat ?
La Conscience
Non ! a-t-il vraiment tout dit ?
Je ne combats pas Victor Hugo car Hugo est mon ami en ma pensée depuis toujours. Il me semble important d'apporter ce que Hugo n'a pas dévoilé car ce n'était pas l'heure et car Hugo savait que les vies successives sont une réalité. *
Le Soi
Bien téméraire ! ne te trompe pas dans ton apport ! Quel sera ton terreau et de quel engrais te serviras-tu pour faire croître la pensée que la peine de mort est une nécessité ou n'en est pas une ?
La Conscience
Mon terreau sera la Vie. Mon engrais sera celui des vies successives. Le fruit sera le futur.
Le Soi
Allons vers le futur !
La Conscience
Mon ami Hugo disait qu'elle était infondée car les vrais coupables d'un délit étaient la misère et l'ignorance. Il disait qu'elle était un meurtre judiciaire. Là est l'essentiel de sa lutte contre cet outrage fait à l'homme. Il parlait vrai. C'était le premier pas pour en parler avec conscience. Ma conscience a fait un second pas. C'est d'elle que je dois te parler. J'ajouterai que la misère et l'ignorance sont les habits de la bête en l'homme ; c'est pour cela qu'Hugo luttait contre les habits de la bête. Cependant, elle a bien d'autres habits qu'Hugo n'a pas combattus car ils n'étaient pas de son époque !
Le Soi
Je t'écoute...
La Conscience
Je dirais avant toute chose que les arguments « pour » émanent de la peur, de la colère, de la volonté de faire justice soi-même. Ils ne sont pas raisonnements ; ils sont sentiments personnels mais sentiments personnels ne sont pas vérité du monde car la vérité du monde ne s'habille que de sagesse et d'amour. C'est une affirmation.
Aussi, en arrivé-je à mon second argument. Que veut le monde ? A-t-il décidé de donner le pouvoir entier aux hommes d'infliger la mort ou n'a-t-il fait que subir la volonté des hommes, sans en tenir compte ?
Le Soi
Un chemin ascendant ne peut plus vouloir le mal, même contre le mal subi. Au contraire, il aide à la transformation du mal en un bien. C'est prendre de la boue pour laver les yeux afin qu'ils s'ouvrent à la réalité. Tant que la boue macule le regard, les hommes ne peuvent voir clair. Ils amplifient la vie de la bête.
Jusqu'où as-tu lavé tes yeux ?
La Conscience
Il ne peut y avoir d' actes d'hommes de justice si l'homme de justice n'était guidé à son insu à la réalisation d'une destinée.
Le Soi
Selon toi, la destinée en est la cause et la conséquence et qu'il faudrait pour cela un homme qui, sans conscience, l'applique ?
La Conscience
Tu le dis. C'est cela.
Le Soi
Je grandis. La boue tombe de tes yeux.
La Conscience
C'est terrible en soi mais c'est une loi d'airain qui a eu lieu jusqu'à présent. La destinée applique sa loi en accord avec ce qui fut décidé avant de naître. Cependant, cela ne doit pas nous laisser froid comme un marbre. La pitié et la compassion face à un tel acte issu de la destinée aide l'homme condamné dans ce qu'il verra dans son après mort et dans la nature de sa mort.
Le Soi
Est-ce à dire que tu es « pour » ?
La Conscience
Je ne dis pas que je suis « pour » ; j'exprime seulement ce que sont les lois de la destinée. Ce que destinée a écrit ne peut être changé. Elle utilise les hommes qui doivent juger un homme en relation de leur karma propre à tous.
Le Soi
Certes ! Et si un jury représentant d'un peuple en vient à la compassion pour ne pas infliger la peine de mort dont il a la charge d'application, en vertu de ses lois, qu'en penses-tu ?
La Conscience
Je dirais qu'il a vu le Soi en chacun des êtres présents et qu'il se sont grandis pour le futur, donnant mieux que le karma strict, c'est à dire la possibilité à l'autre de voir la compassion comme un ferment d'évolution plus grand que ce qu'aurait été la peine de mort car, celui qui reçoit compassion face à la mort voit cette compassion. La perpétuité serait plus sage si il y a crainte d'une récidive car la bête est muselée.
Que sait le monde et ses hommes ? La bête se meut invisible.
Le Soi
Et... si il n'y avait aucune compassion en regard des actes commis, ce serait terrible pour l'avenir de l'Humanité car cela libèrerait la bête totalement en l'homme !
La Conscience
Il ne nous appartient plus en notre époque de juger ce qu'un homme mérite. Si Tu es en marche, c'est que Ton devenir est déjà en face de nos regards, et en cela nous ne pouvons pas nous placer en hommes tout puissant.
Le Soi
Nous avançons.
Si je te suis bien, tu es donc « contre » ?
La Conscience
Je suis « contre » car, qui suis-je pour décider en pleine conscience, à cette heure, de l'avenir d'un homme dans la suite de ses incarnations et de ses karmas de vie, ses destinées qui se déroulent en face de moi, quoi qu'il ait commis, dont je suis parfois l'acteur et d'autres fois n'ayant aucun lien avec ces vies ? Qui suis-je pour remettre en cause ce que sa divinité a décidé tout en prenant part à ce qui est d'humain en son cœur ? Si je ne sais pas encore tout ce qui est bon et bien pour moi, comment le saurais-je pour quelqu'un d'autre car, il ne faut pas se faire d'illusion, je dois d'abord voir clair en moi-même pour juger d'autrui.
N'y a-t-il pas cette bête en chacun de nous qui n'attend qu'à se réveiller pour commettre l'irréparable si nous ne la maîtrisons pas ? J'en veux pour preuve la masse de mensonges que nous pouvons proférer tous les jours, aussi la masse de pensées hostiles, la masse d'actions qui n'ont pas visage humains et qui vont nos rues chaque minute. Si un mensonge me blesse, puis-je me faire justice ? Non ! Suis-je à même de condamner chacun ? Tout au plus puis-je les reconnaître et dire que pour Toi, je ne veux pas réveiller la bête et la laisser agir. Tout est dans la mesure et n'oublions jamais qu'une idée pensée par mille hommes individuels devient pensée commune à notre insu.
Le Soi
Victor Hugo chante. L'entends-tu ?
La Conscience
Ce que je ressens à cette heure est son amitié profonde dans son Amour qu'il déverse en moi, en Toi, car tout ce qui est en haut est en bas le miroir d'une action, d'une décision, d'une volonté tant que je ne suis pas pleinement libre en Toi.
Le Soi
Revenons à la peine de mort !
Si un homme, de nos jours, décidait qu'il serait sage de remettre la peine de mort d'actualité, que lui dirais-tu ?
La Conscience
Qu'il est en train de laisser la bête s'affairer en lui, et que cela ne doit pas être ! Nous ne devons pas devenir semblable à ce que nous déplorons. Or crier au retour de la peine de mort, c'est être son éxécuteur ; nous devenons l'assassin.
Tuer une bête et dix autres surgissent car la bête se venge toujours, aussi odieux qu'ont été ses propres crimes nous ayant fait pleurer. Les guerres sont un autre collier de pierres noires de la bête dont les hommes n'ont pas conscience.
Le Soi
Que diras-tu à la bête ? Comment lutteras-tu contre elle ?
La Conscience
Que je l'aie sous mes yeux ; mes yeux lavés tous les jours ; que je la regarde car elle ne peut me regarder et craint mon regard dans la conscience que j'ai d'elle. Il ne faut pas craindre de la regarder car c'est lui donner moins de pouvoir d'action lorsque nous la regardons en face. Seule la bête en l'homme, aujourd'hui, décide des peines de mort.
Vois les hommes s'armer partout au nom de la légitime défense ! ils ont donné pouvoir à la bête, non à leur Soi par la Conscience acquise.
Le Soi
Je le sais. Ainsi est l'homme avant d'être Homme, son Humanité fait de lents pas. Souvent, il recule et se déchoie seul.
La Conscience
Est-ce ce qu'il veut pour lui ? Déchoir ?
Le Soi
Il a la liberté aujourd'hui de choir ou de s'élever sur son chemin.
Lutter pour rétablir la peine de mort est une chute, et le Soi souffre comme si nous le pendions de nos propres mains coupables à une corde.
Cependant, nous sommes toujours à l'heure des karmas et de telles pensées erronées induiront un karma juste,par une souffrance car, aussi curieux cela soit-il, l'homme n'apprend qu'en souffrant ; c'est ainsi. Il n'y a plus d’œil pour œil, de dent pour dent, mais ce que l'âme estime juste, pour elle, sera sa souffrance pour corriger l'erreur de pensée. Tant que la réalité des vies successives pour atteindre la perfection ne sera pas évidence pour chacun, l'homme sera dans l'errance.
M'as-tu tout dit ?
La Conscience
Non ! C'est Toi qui a tout dit. Merci.
Je ne t'ai pas encore parlé des hommes qui sont coquilles vides, alimentant la bête.
Restons en là pour aujourd'hui.
De quelle couleur brilleras-tu ce soir ?
Le Soi
Je commence à naître à moi-même et vais avec toi vers l'Esprit de Vie. Tant de chemin avons-nous devant nous ! Je suis au-delà de la couleur ce soir ; je suis dans la lumière qui anime toutes les couleurs.
* Si Hugo a fait du spiritisme et que cela est connu, il n'écrivait qu'exceptionnellement sur les vies successives de façon claire à la lecture, pourtant c'était le centre de ses écrits, notamment de "la légende des siècles " et des " contemplations" ... : https://assoalpha.org/o-m-h/grands-hommes/victor-hugo/ et https://blogeditionsbanyan.wordpress.com/2017/01/16/victor-hugo-et-linde/ il n'était donc pas étonnant qu'il ait combattu contre la peine de mort sans dire pourquoi, mais nous savons, tous, combien ce combat fut de ses combats le plus acharné, toute sa vie durant.
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