Les comptines ne sont pas des poèmes mais des poésies enfantines. Elles sont ce que j'écrivais lorsque j'étais enfant pour m'initier à la poésie, déjà fortement impressionnée par le poème, pour les raconter à mes copines dans la cour de récréation. À sept ans, je lisais Victor Hugo, ayant su lire à cinq ans, avec un apprentissage à mes quatre ans en maternelle, la directrice ayant décelé en moi une capacité et une volonté de lire. Elle me gardait pendant les récréations dans la classe pour m'apprendre la lecture. C'était à l'école du Château Gaillard à Orléans. J'en ai encore un souvenir puissant. Nous apprenions des poèmes simples de Victor Hugo - l'époque donnait un apprentissage précoce de la beauté ce qui n'est plus le cas aujourd'hui - et j'avais été éblouie par ces poèmes. Mon père m'offrit alors mon premier livre du poète "L'art d'être grand-père" et ma mère m'offrit ma première biographie du poète, livres que je possède encore. Je les lus avec avidité et admiration. À sept ans, je connaissais la vie de Victor Hugo et pouvais parler sans lassitude des grands traits du poète. L'idée germa de vouloir lui ressembler et de commencer à écrire mes propres comptines. Bien sûr, je ne fus jamais à la hauteur de celui que j'admirais et admire toujours. Il était un rêve. Mon désir d'écrire commença au "Martin Pêcheur", petite maison située au bord du canal de la Loire à Olivet. Elle avait un grand jardin riche en pâquerettes rouges et de roses églantines sur une vielle tonnelle rouillée. Un puits trônait dans ce jardin. Je m'asseyais tous les soirs sur le perron face au canal. J'admirais le silence du soir et ses couleurs dans ses reflets sur l'eau.
Ces comptines dont je n'ai rien gardé car beaucoup furent orales me sont restées en mémoire. Je peux les relire en mon souvenir comme des paroles simples, légères, papillonnant autour de mon âme. Celles écrites disparurent, probablement jetées par moi-même, car ne les jugeant pas d'importance. Je n'en ai conservé que l'état d'esprit. C'est cela que je donne dans ces comptines que j'écris encore parfois lorsque je suis fatiguée pour retrouver ma fraîcheur d'âme d'avant 1964.
Je me souviens de ces attroupements autour de moi, dans la cour de l'école, où mes amies me demandaient encore et encore de les divertir. Cela ne dura qu'un temps, jusqu'à mes onze ans, puis plus rien car je déménageais et que mon environnement n'était plus le même. Je ne vivais plus dans un monde géographique de nature Hugolienne proche d'Orléans, mais dans un monde physique sorti tout droit des romans de Zola : Les usines à Longueville en Seine et Marne. Je passais d'un extrême à un autre, de la beauté à la laideur. Que faire de la laideur ? J'en étais très triste. J'étais seule. Un jeune garçon vint vers moi dans la nouvelle cour d'école que je découvrais mixte alors que je n'avais connu que des écoles de filles, et de par son amitié me sortit un peu de cette mélancolie ; il me dit " Pourquoi tu es toujours triste ? Tu n'as pas d'amies ici. Je veux bien être ton ami. Tu le veux ?" J'avais douze ans.
Mes comptines se turent et le poème naquit vers mes seize ans, cinq ans avaient passé. La mélancolie en était la cause et le fruit.
Et, si il vous venait à l'idée d'enseigner ces comptines en classe, juste m'informer. C'est tout. Car même sous copyright, j'accepte volontiers qu'elles soient partagées, mon identité de poète respectée.
Photo personnelle : roses de mon jardin
C’est une rose,
Je vous embête !
Une rose, toujours !
Elle, rien qu’elle.
Pourquoi s’ouvre-t-elle
quand nuit est noire,
quand étoiles l’éclairent ?
C’est la rosée de la nuit.
Elle a allumé le ciel
et le ciel est descendu,
il a sculpté les pétales,
les pétales et mon cœur.
Mon cœur a dit :
Comme tu es belle !
La rosée a chanté,
un papillon est venu.
Mais il fait nuit !
Tu ne dors pas ?
Le papillon a dit :
Devrais-je dormir ?
Oui ! Je t’attends.
La nuit, tu es lumière.
Le jour, tu es triste.
C’est la rose qui le dit.
Elle est venue
éclairer le sommeil,
et dans le jardin a dansé,
dansé sur une goutte d’eau.
Photo libre de droits : Sheila Brinson Deviant'art
https://www.deviantart.com/sheila-m-carlo/art/Centered-784465403
La goutte d’eau a brillé,
le papillon aussi,
la rose est devenue flamme,
la flamme a souri.
Elle s’est mise à briller
dans le miroir de la goutte,
et l’eau heureuse d’être ronde
a sauté sur ma joue.
Ma joue a brûlé
car l’eau était une flamme,
une flamme d’amour
qu’un parfum dévoile.
C’est une rose,
oui ! Je vous embête !
Une rose, toujours !
Une goutte encore !
Photo libre de droits
Photos personnelles : Roses de mon jardin
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C’est un soir
comme un autre,
Non ! Pas vraiment !
C’est ce soir.
Ce soir est noir.
La lune est absente.
Absentes sont les étoiles.
Pourtant brille le soir !
Le soir a pris une rose
en sa nuit sombre,
et la rose a fleuri,
la nuit aussi.
Elle a rêvé, moi comme elle ;
Il a dormi ; elle comme moi,
La nuit et la rose ensemble
alitées sur un drap blanc.
Le drap est un ciel
et dans le ciel joue une rose ;
le soir a dit à la nuit :
Viens ! Il fait sombre !
La nuit a souri,
les étoiles sont venues
danser dans le soir
sur le vaste drap blanc.
J’étais émerveillée,
et l’émerveillement a dit :
mes yeux sont riches,
riches d’étoiles dans la nuit.
Vous ne me croyez pas ?
Vous avez tort,
car le soir et la nuit
dans une rose sont nés.
C’est ainsi !
Tant pis si vous doutez !
Regardez le soir !
Regardez la nuit !
Une rose sur ma lèvre !
Vous ne rêvez pas,
Oh ! la nuit parle :
Bonjour ! C'est moi, au Matin !
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C’est un livre.
Que dis-je ?
Ce sont des pages
cousues ensemble.
Ce sont des pages.
C’est un livre.
C’est un poème.
Que dis-je ?
Ce sont des mots muets
qui ne disent rien.
Certains sont mauvais.
Quelques poèmes.
C’est une note.
Que dis-je ?
C’est un bruit
que le piano mal accordé
laisse grésiller.
C’est un bruit.
Je m’en vais.
Que dis-je ?
Médiocrité, je délaisse.
Silence s’impose.
Partir aussi.
Je ne reviens pas.
Au revoir.
Odilon Redon
llustration Viktor Nizovtsev http://www.mcbridegallery.com/nizovtsev.html
C'est un rosier.
Que dis-je ?
Un rosier blanc,
Un arbre de roses,
Blanche pureté.
C'est une branche.
Que dis-je ?
Un tronc,
Une lignée,
Une rosace.
C'est l'incroyable.
Que dis-je ?
La beauté
D'une parure
Ornant nos fronts.
Une rose,
Rien qu'une rose !
Que te dirai-je
De l'amour d'une fleur ?
Les pétales volent.
C'est un jardin.
Que dis-je ?
Un jardin est foyer,
Un havre de paix
Par tous les temps.
C'est une couleur,
Un pinceau coloré.
Il rêve. Elle rêve.
La mésange se pose
Sur la branche.
C'est une liberté,
Une rose dans un jardin,
Un jardin spontané
Quand il pousse
Tel un enfant.
Que t'ai-je dit ?
Je ne sais plus.
C'est un ange qui passe
Dans la rose.
Chut ! Entends le !
Il passe céleste,
S'arrête dans le rosier,
Blanc comme ses ailes.
Pourquoi ont-ils des ailes ?
Les anges ont des ailes.
Il se baisse.
La rose est troublée.
Que dis-je ?
la branche est émue.
Ciel ! Un ange !
L'as-tu vu passer
Assis sur la rose ?
Assis, passe-t-il.
L'ange aime les roses
Et le jardin rose.
La rose a écouté.
Que dis-je ?
la rose a parlé à l'ange.
Une fée est née.
C'est ainsi.
Rose a dit ange.
L'ange a dit rose.
Le monde s'est créé.
Le jardin est témoin,
Des mots engendrés.
Le rosier a plié.
Ses ailes sont des branches.
L'ange s'abaisse,
Regarde l'homme
Qui aime la rose.
Dans le jardin
Devenu jaune soleil,
L'ange aime l'homme.
Il me l'a dit.
L'homme ne l'a pas vu.
Ange et rose, depuis
Sur le puits où l'on puise
L'eau de la vie,
Ont dit le poème
Venu de la lumière.
C'est ainsi.
C'est un ange sur une rose,
Dans un jardin bleu,
Le ciel chante l'amour
Le jour où la rose est née.
Je n'ai rien dit.
J'ai regardé.
J'ai écouté
La rose, et l'ange
Qui vole assis dans le rosier.
L'ange a dit merci,
La rose aussi.
La branche a prié,
La rose aussi.
L'ange se repose.
Tableau du peintre Russe Viktor Nizovtsev
http://beatrice-lukomski-joly.copyright01.com/
photo : https://pixabay.com/fr/hiver-transf%C3%A9rer-nature-ciel-3126579/
C'est un arbre.
Que dis-je ?
Un saule !
Arbre gaiement pleure.
C'est une fleur.
Que dis-je ?
C'est une rose !
Fleur dans sa robe somnole.
C'est un oiseau.
Que dis-je ?
Un rouge-gorge !
Oiseau dans la forêt vole.
C'est un rêve.
Que dis-je ?
Ai-je rêvé ?
Rêve éclot mes rêves.
C'est une libellule.
Que dis-je ?
Des ailes bleues !
Aile se pare de pourpre.
C'est un joli rien.
Que dis-je ?
Rien est plein !
Plein s'emplit de petits-riens.
C'est le vide.
Que dis-je ?
Vide est riche !
Riche est ma maison.
C'est une pierre.
Que dis-je ?
Pierre est édifice !
Édifice est la vie.
C'est une lumière.
Que dis-je ?
Lumière est flambeau !
Flambeau est le chemin.
C'est ce soir.
Que dis-je ?
Je n'ai rien dit !
Je suis le silence.
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