Béatrice Lukomski-Joly


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L'invisible baume

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

Le promeneur de Friedrich David Gaspard

http://Friedrich David Gaspard

 

Si vous croisez une ombre

qu'un nuage envoie idéelle,

et que l'ombre pense, sombre,

m'avoir vue dans une ruelle,

ne croyez pas que je suis l'ombre.

 

Si vous pensez m'avoir connue,

et que j'ai effleuré votre pensée,

ne croyez pas que je suis venue

arpenter les méandres des traversées

qui existent dans la pénombre.

 

Si vous m'avez vue, peut-être !

Pensez que je fus une illusion,

penchée invisible à ma fenêtre,

car je suis l’adoration

des pensées magnifiées en Moi.

 

Je suis l'un et l'autre,

pour être, de tous, le visage,

quand accablée, je vois la peine,

et que le chagrin cache l'alpage.

Je ne suis que la montée vers l'émoi.

 

Si vous pensez m'avoir croisée

à la baie des pensées larges,

et que vous croyez m'avoir enlisée,

reculez ! je suis d'une page, la marge,

et des empyrées discrets, je suis le regard.

 

Si quelqu'un disait me connaître,

répondez que vous ne m'avez reçue

sans voir un éclat de lumière affleurer

la grande ardeur à aimer, juste aperçue,

car aimer ne se voit pas à tous les égards.

 

Si vous croyez avoir vu l'Amour,

de sa vérité naîtra votre visage

quand sous l'orage, rien ne me racontera.

J’irai de vos déconvenues, sage,

qui n'ont aucun sens à ma pensée.

 

Jamais, je ne suis l'abaissement

qui, tout, veut saisir de bleus,

l'âme qui donne d'effondrements,

les espérances attendues de vœux

que les attentes ont reniés, affaissées.

 

Si l'on vous demande qui je suis de psaume,

répondez que vous ne le savez pas,

car du monde, je suis l'invisible baume

que le blanc habille de jours à trépas,

quand le cœur se dévoile au grand jour.

 

Si vous croisez une ombre à l’aube,

qu'un nuage envoie, idéelle, pour moi,

passez chemins et traverses, troubadours,

car de l'amour, rien ne se jette ni sa foi,

que ma pensée donne de blessures sombres.

 

Avez-vous vu l'amour blesser ses ailes,

et pourtant aimer ses petits sur la rive,

que je pense souvent à l'oiseau à tire-d'ailes

qui vole de branche en ciel qui arrive.

Insoupçonnée clarté qui, tout, donne du nombre.

 


 

 

 

Il est parti avec le vent

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

Il est parti avec le vent

L'âme indolente, les bras ballants,

Le cœur affolé, la pensée irraisonnée.

 

Il est parti en plein jour,

Un soir d'hiver, sans secours,

Il n'avait dans le cœur que sa destinée.

 

Puis, sous les vagues du temps,

L'amertume pour tout bagage suintant,

Il est parti le vide accroché à ses semelles.

 

Il avait cru, avant de choir,

En le fol espoir d'aller bien le soir

Quand du jour plus rien ne reste dans la gamelle.

 

Il avait goûté à tout, de biais,

Sans avoir soif, ni faim, jamais

Parce qu'il croyait que vivre était désespoir.

 

Quand les paradis artificiels

Se sont éteints dans l'orage sacrificiel

Il s'est levé, titubant, désœuvré dans le noir.

 

Il n'a rien vu des larmes versées,

De sa femme le serrant contre son cœur blessé,

Aux sanglots torrentiels sans barrage, ni écluse !

 

Un enfant est né de l'union ténébreuse,

D'elle, à la frontière du borderline, la gueuse,

Qu'elle s'est évanouie dans le vent qu'hommes abusent.

 

LA DAME AU MANTEAU EN CACHEMIRE.

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

Tableau de Michel Garnier 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Michel_Garnier

 

Par un bel après-midi d'automne, une femme fière de sa bonté dit : «  Tous les jours, lorsque je vais faire mes courses, je donne une pièce à un clochard assis au coin de la rue. »

La dame était aisée et n'avait pas eu le besoin de travailler pour sustenter sa progéniture. Aussi s'émerveillait-elle lorsqu'elle donnait l'aumône à quelques uns, quelques unes, terriblement dans le besoin, mais de ces besoins qu'elle n'avait jamais connus, pas même la plus petite parcelle des yeux qui implorent sans le montrer vraiment, parce que le besoin ne se dit pas. Après tout, ne se voit-il pas ? Parfois ne se devine pas.

L'après-midi était superbe, et tout semblait paisible dans le beau quartier, que seuls les gens habillés de cachemire, de soie et de beau cuir, habitent. Cependant, existait un clochard, pas très loin, un peu en retrait du beau quartier, car habiter un trottoir pavé de belles pierres ne se fait pas.

La dame aimait Victor Hugo, Léon Tolstoi, tant d'autres, parce qu'ils décrivaient cette misère qui fait pleurer le soir avant de s'endormir sous de beaux draps, dans une vaste chambre, afin d'avoir bonne conscience et de dire que l'on comprend l'infortune. Ah ! Les grands auteurs ! s'ils n'étaient pas là, que comprendraient les petits bourgeois, les grands aussi,  sur l'adversité et ses combats de tous les jours ? Peu ! Rien !

On allait, là, à l'église, toujours heureux de dire que le clochard du coin était béni de sa pièce quotidienne et qu'il pouvait au moins se sustenter d'un bon quart de vin, à défaut d'avoir un vrai repas, mais elle avait donné sa pièce, histoire de s'endormir avec une belle prière :

«  Vois, Seigneur, tout le bien que je fais ! » Le prêtre, aussi, trouvait la dame forte de bonté. Toujours calme, souvent calme, pouvant perdre son calme.

Tous étaient admiratifs jusqu'au moment où elle lâcha un rire, s'esclaffant d'un «  J'ai au moins -MON- clochard ! Celui-là me suffit ! »

La petite assemblée poussa un oh ! sans qu'on sut si c'était admiration ou écoeurement, quand un adolescent dit :

«  J'aimerais bien faire de l'équitation, mais je n'ai aucun moyen pour en faire ! » L'adolescent étaient de ceux qui n'ont rien, ou si peu, qu'ils donnent une pièce glanée difficilement, à un homme dans le besoin, sans le dire à personne.

La dame répondit à l'adolescent : «  C'est bien d'avoir des rêves, ils font vivre, et même si tu ne peux jamais les réaliser, ils te feront vivre parce que tu espéreras toujours et que sans espérance, tu ne seras rien. 

«  Quoi ? cria l'adolescent. C'est tout ce que vous avez à dire ? »

La dame perdit son calme et hurla vers son époux : « Martin ! Tu entends ce que cet adolescent me dit ? Je serais une infâme mégère ! » chose qui n'avait pas été formulée !

La dame avait juste su crier ce qu'elle savait d'elle, c'est à dire qu'elle était une mégère.

Le lendemain, c'était dimanche, c'était encore une très belle journée ensoleillée, elle alla à la messe avec son époux , heureuse d'avoir entendu un superbe passage des Evangiles. Etait-ce saint Mathieu 19-16/30 ? Elle alla donner sa pièce au clochard, allant chercher son pain, tout en disant à l'adolescent qui n'allait pas à la messe, mais qui donnait -de temps en temps- une pièce à n'importe qui d'assis sur un carton humide, le veston mangé par les mites, sans rien dire : Vois-tu ! plutôt que de me croire mégère, tu devrais aller entendre ces belles paroles ; tu n'en deviendrais que meilleur, et tu comprendrais que l'espoir est un aliment.

Elle avait dit aliment comme on dit : je n'ai plus faim, j'ai assez mangé, pendant que d'autres meurent vraiment de faim.

L'adolescent n'avait pas treize ans.

La dame enleva son manteau en cachemire, et l'adolescent remis son pull-over pour ne plus jamais revenir.

 

 

 

Le banquier et l'astronome

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

 

Photo de Francis Atlas http://francis94.zenfolio.com/p174142033

Une mère élevait seule ses enfants. Elle n'avait pas eu de rêves matériels pour eux si ce n'était de les rendre bons, humbles, moraux et hauts de conscience et d'amour.

Les tâches ne manquaient pas. L'argent rentrait à la hauteur d'un seul salaire et suffisait à peine mais la mère était comblée d'avoir un travail pour sustenter sa progéniture. La misère était souvent au rendez-vous mais nul ne manquait jamais de rien, la Providence veillant à rétablir l'équilibre dans une maisonnée où de tels souhaits étaient prononcés.

Les anges avaient en cette chaumière une ouverture, il fallait bien la saisir !

La mère demanda un soir après avoir lu un conte à ses enfants ce qu'ils aimeraient faire plus tard, quel était leur vœu de métier.

Le premier dit: « Moi, je serai banquier ! Je veux avoir beaucoup d'argent et bien vivre. Et aussi je veux être archéologue. 

« Tu y arriveras mon fils ! dit la mère. Tu vivras bien et tu gratteras aussi la terre mais il te faudra beaucoup travailler pour cela. Je t'offrirai les moyens d'y arriver c'est à dire mon soutien et mon amour. Vois comme je travaille dur et comme nous ne manquons de rien, comme nous sommes heureux !"

Le second dit : « Moi, maman, je serai astronome pour me perdre dans les étoiles et être toujours libre, voler comme les oiseaux, la tête légère dans le ciel. 

« Tu le seras ! répondit la mère. Tu seras libre comme l'oiseau mais avant il te faudra connaître la cage pour apprécier ta liberté. Derrière tes barreaux, tu regarderas le ciel puis comme les oiseaux, tu atteindras tes inespérées étoiles. »

La mère avaient prononcé ces mots avec tendresse et moralité comme on lit un conte qui enseigne.

Les années passèrent. Les garçons avaient grandi, ils étaient devenus grands et beaux.Ils s'étaient donné les moyens de leurs rêves, tant bien que les anges n'avaient jamais oublié les paroles de ce beau soir de complicité et de partages et les prirent au mot.

Le premier-né devint rebelle, anarchiste, provoquant partout où il y avait de l'argent à prendre, c'est à dire voler; non pas comme son frère l'avait espéré pour lui-même mais un voleur simplement, un qui prend tout sur son passage pour revendre les biens d'autrui. Il prenait la terre par poignées pour la jeter sur les passants.

« Bien ! pensa l'ange gardien.  C'est ce qu'il veut ! Être riche de la sorte, je lui donnerai la rue, la nudité, la laideur ! Il veut fouiller la terre, je le ferai dormir dessus été comme hiver, qu'il pleuve, qu'il neige ! Il sera inscrit en lettres noires sur son corps le passé de ses désirs. Il se tatouera un " A " qu'il devra relever d'un phœnix. »

Le second oublia les étoiles et leur ciel et préféra les étoiles de la drogue et de l'alcool. Il planait avec délice mais chaque retour le fracassait comme chaque "voyage" d'ailleurs ! De substance en substance, il ne faisait plus que toucher terre, rampant comme un serpent.

« Bien ! dit l'ange gardien du second.  C'est ce que tu veux ? Les étoiles ne t'intéressent plus et tu voudrais que je meurs à moi-même alors que j'ai envie de l'astre solaire que tu n'imagines pas comme étant plus rayonnant, plus rassurant, que tes doses étranges ! Tu as oublié les oiseaux et leur magnifique envol vers la liberté ! Je t'offrirai la cage et les barreaux ! Pendant sept ans, tu connaîtras ma coupe de colère et tu ne verras plus le ciel que derrière des murs en béton et de tes fenêtres par des barreaux doubles ! 

« Bien! dirent les deux anges en un seul chœur . Ils auront ce qu'ils ont mérité ! Nous aurons à beaucoup aimer leur mère qui sera noyée de chagrin pour l'aider à garder l'espérance de leur vœux premiers. Ne fermons pas le toit ! "

Les années continuaient à passer, lentes pour chacun, la misère grandissante, l'effroi, la terreur, le froid dans les cœurs mais pas dans celui de la mère, qui terrassée, ne se mit qu'à les aimer davantage en leur disant : « Je vous attends. Je compterai, certes les heures, mais chaque jour où le soleil brillera, je vous donnerai le pain et le vin qui n'a de substance qu'en l'éther des mondes. De vos jeunes vies, je ferai le berceau des étoiles en l"oiseau qui n'a besoin que de paille et de grains pour vivre. »

Les anges entendirent cela et se mirent à chanter. Ils avaient une amie terrestre qui avait bien de la douleur mais ils savaient qu'ils pouvaient compter sur elle.

Sept années furent révolues.

Le premier-né revint à la maison. Il embrassa l'amour, c'est à dire sa mère.

« Acceptes-tu que je me repose chez toi ? dit-il. J'ai trouvé un travail, maman ! Je commence demain, je vais être éboueur . Regarde ! J'ai tatoué un phœnix sur mon "A" pour que plus jamais il ne ternisse ma mémoire.

- Bien mon fils ! installe-toi en notre maison, tu es bienvenu. Viens ! allons dîner car il se fait tard et je pleure encore ton frère, vois-tu, mais toi ce soir tu me donnes un sourire qui fend le toit de notre maison pour rejoindre les étoiles ; donnons le à l'oiseau qu'il le mène à ton frère derrière les barreaux de sa prison. »

Le second arriva peu de temps après. Il embrassa l'amour, c'est à dire sa mère et dit :

« Comment as-tu pu vivre toutes ces années de douleurs ? Tu n'as jamais failli à ton sentiment ! Comment fais-tu ? Je veux juste manger un repas avec toi puis partir vivre décrocher les étoiles pour toi. Je veux que chacun de tes sourires soit autant d'étoiles que les oiseaux porteront au ciel. J'ai fait tout ce que je dois faire : trouver un logement, un travail, faits mes papiers. Je suis libre. Libre ! 

- Qu'as tu appris ? dit la mère au premier-né.

- J'ai appris que l'argent et les choses n'ont pas de valeur, qu'ils procurent malheur chaque fois que je ne pensais que par eux sans voir l'utilité qu'ils procurent en la vie. J'ai appris à vivre avec si peu de choses dans la rue que je n'ai plus de besoin superflu. J'ai appris surtout que l'amour est plus grand que toutes les choses et l'argent du monde. J'ai eu pitié de toi chaque fois que tu me voyais sous un pont, sur un banc, m'apportant à manger, autant que je ressentais ta compassion. 

- Qu'as-tu appris ? demanda la mère au second fils.

- J'ai appris que tes sourires étaient les plus beaux des oiseaux, tes dons les plus belles des étoiles. Je les ai explorés et ai découvert des mondes insoupçonnés que je n'aurais jamais pu imaginer sans les barreaux que j'ai dessinés. J'ai exploré le ciel chaque soir derrière ma fenêtre qui donnait sur le vaste champ de solitude et chaque matin, je patientais pour jeter le jour qui a passé en une brassée de feuillets que je regardais voler au vent chaque septième jour. »

Les fils serrèrent leur mère tout contre eux, si fort, qu'elle vit les oiseaux voler loin des cages dorés, loin des cages prisons, loin des trous noirs. Ils étaient devenus beaux.

« Bien !  dirent les anges. Nous croyons qu'ils ont compris la leçon. Chaque larme qui coule est un sourire pour nous et chaque sourire est un rire, alors que demander de plus ? Voici bien une famille heureuse qui n'a fait don que de ses sourires et de ses rires à nos volontés solaires.

Reprenons notre chemin ! Un peu de repos nous fera le plus grand bien avant la prochaine leçon ! Et si ce n'est en cette vie, ce sera pour l'incarnation suivante… car nul n'adore Mamon sans récolter le fruit de sa misère. Nul n'a conscience que tout est continuité ! Ainsi le proclame le soleil !  Qui croit que la perfection s'atteint en une seule vie possède une poutre en son oeil. »

 

paru dans "Poèmes solaires, poèmes lunaires" aux éditions du Bord du lot

http://beatrice-lukomski-joly.copyright01.com/

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L'enfant et le lys

Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentaire

Peinture http://www.rsh.anth.org.uk/

 

Viens, ô saison des lumières, ô joie, ô vie !

Viens guider par ta large main épanouie

Celle de l'enfant rêvant de lier ta branche

Au ciel se relevant quand finit sa nuit blanche.

 

Si vallons éclairent l'âme d'idées nouvelles,

Et de leur verdoyant reflet, louent tes voyelles,

Dis au monde le sublime de l'aube bleue

Que le silence a engendré de tes beaux yeux.

 

Regarde, petit, comment naissent les narcisses

Quand hauteur rêve de son manteau de mélisse,

Et de sa poésie dit l'éclat du printemps,

Vois comme le ciel aime ses astres brillants !

 

Si au petit matin, ouvrant tes yeux d'enfant,

Ton regard embrase les rayons triomphants,

Vois l'élan du renouveau te ceindre d'éclat,

Et prends de ma sagesse la raison des lilas.

 

Mon enfant, si j'ai rêvé te montrer l'aurore

Quand proche de la lune, tu chantais d'accords,

Ô plénitude, toi, beau comme le soleil,

J'ai pris dans mes bras ton amour qui m'émerveille.

 

J'ai demandé au ciel que cesse le tourment

Pour vivre de toi l'éclat de ton firmament,

Et sur les heures vécues au creux de ton nid,

Voulu que brille l'étoile à l'épiphanie.

 

Sens l'odeur du lys venant à pas de velours !

Vois la couleur des roses, gentil troubadour,

Que la saison des lumières t'offre en ce jour

Quand mon index pointe, vers bel avril, l'amour.

 

Volant dans le ciel des poètes à la source,

Traversant la fraternité de la Grande Ourse,

Prenant de l'étoile polaire ta naissance,

Je t'ai cueilli, céleste, dans ton innocence.

 

Si encore le jour sculptait tes nuits à l'aube

Et que nos mains par nos destinées vêtues d'aube

Voulaient, du grand lys, nos vies de blancheur sublime,

Sois la chrysalide des prairies et des cimes.

 

à Marlon Joly

peinture issue de l'enseignement Waldorf

 

Klaus Hoffmann - Jedes Kind braucht einen Engel

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