Les hommes de marbre
Rédigé par béatrice Lukomski-Joly Aucun commentairePhoto issue du site :
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Ils vont les gens de marbre,
l’âme non sculptée, nus de nacre,
la vie triste, heureux, enchantés,
persuadés d’être de grande beauté
que d’un regard habile et rusé,
ils accablent tout autre méprisé.
Les êtres de marbre au pied d’un arbre
sont étonnants de dureté, l’âme criarde,
égaux de la froideur du minéral, fiers,
qu’aucun ciseleur n’ose tailler la pierre
d’un marteau, d’un ciseau, d’un burin,
pour la joie de créer une œuvre sur le lutrin.
Quand, cachant l’origine de leur gel sans fin,
qu’hivers ont sculpté avec dessein,
jamais nous ne devinons dans leurs regards
s’il y eut quelques printemps cathares,
s’il y eut quelques étés ardents à chérir,
eux ne sachant jamais sourire.
Se pensant plus talentueux que l’artiste,
ils regardent la figure de leur cariatide,
figés dans le schiste blême, noir ou gris,
sans commencer le travail ardu de l’esprit
pour voir naître l’éclat de la grâce
qu’ils lapident d’un œil avec audace.
Sans douceur ni fraternité, sévères,
ils ignorent la quintessence de leur sève
méprisée sur la berge qui n’est pas sentier,
et sans une ride dessinée sur le métier,
ils vont de leur pauvreté masquée
sans fêter une main tendue à leur vue étriquée.
Glacés comme la neige en janvier,
ils vont les gens de glace sur le gravier,
gratifiant leur givre sur leurs fronts,
heureux d’être tel un iceberg sur leur perron,
refusant de montrer leur fausseté
qui les revêt d’indignité feutrée.
Ils vont les gens de marbre,
l’âme immobilisée, entartrée,
la vie terreuse, heureux, opaques,
dressés comme des serpents à l’attaque
que d’un regard rusé, ils immobilisent,
accablant tout autre qu’ils enlisent.
De Viktor Vasnetsov Sirin Alkonost