Les cathédrales de pierres
Rédigé par Béatrice Lukomski-Joly 2 commentaires
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La forêt est un temple, charpenté de chemins argentés,
Dans laquelle s'élève abondance de cathédrales.
Ciselées de lumières et de dentelle ombragées,
Elles bruissent des musiques d'orgues ancestrales.
Au sein des rayons que le soleil chatoie d'ondes d'or,
De trois harpes, vingt quatre vieillards, là, resplendissent.
Des chants de paix par mille s'élèvent, et le temps les adore.
Pas un bruit, sinon un silence d'arbres caressant sa pelisse !
Ô ! montagnes ! Tous ces monts d'ascension à l'envol tendu !
Ces châteaux de pierres abrités par la sagesse des chênes pensent,.
Ces sapins aiguillés aux cascades des eaux claires entendues
Ruissellent de source vive, dans la pureté de son cœur danse.
Dans ses jardins serpentent torrents creusés de main divine
Que sa chandelle encore allume de mémoire alpestre.
L'arc en feux d'étoiles brille de leurs cimes et racines
Que mille flambeaux ornent de mille roses rouges célestes.
Elle sarcle le feu créateur, sans lassitude, sans amertume.
Nature mystica flambe à mon front perlé de rosée d'éclat
Que pluies sur les branches symphonisent de brume,
Et c'est la feuille qui s'envole jusqu'à trépas, sans trépas !
Le plissé des falaises enseigne les avenirs qu'il dépose,
Qu'aucun livre n'enseigne, car il Est, et seul se signe.
De tous temps, vertus vraies enseignent ses roses,
Aimant ses flancs de pierres et ses coteaux de vignes !
Champs, bois, prairies, habits des cathédrales de pierres
Que vos narcisses follement odoriférants m'honorent,
Comme un ballet de pétales se déployant d'un sourire lierre.
Sur la couverture verdoyante, je me couche et dors,
Je me tais, car il n'y a de mots qui ne se glissent en bouche,
Sans que le temple ne se détruise chaque jour davantage !
Ô ! Temple de cathédrales de pierres, ma douce souche !
Forêt des sagesses en mon cœur, je vous ramène en mon âge.
N'ai-je rien vu de plus beau qu'au temple de nature, sa cathédrale,
Sur ses falaises stratifiées qui, tout, donne, tout, apprend,
Tout aime, tout chante, et garde secret au rein des vœux fatals,
Qu'au plus intime du cœur de l'esprit prit forme lentement ?
Sous nos regards lavés d'ondées et de chaleur ondoyante à la vie,
Dans la clameur du cri du bien-naître au corps de l'esprit,
Que plus personne ne voit ni ne réclame d'heures embellies,
Qu'ai-je entendu du son des cors et des trompettes qui me prit ?
Je veux asseoir la falaise au faîte de sa hauteur, sur mon flanc,
Dans le chœur des pensées désertées pour que pensées renaissent.
Je veux glisser sur l'aile du vent, et approcher le nuage blanc
Qui a forme d'ailes, pour laver l'imposture des ignorances qui paissent.
À la pointe de la lance des élans téméraires, je veille,
Pour l'éclat ruissellé des sapins que l’œil voit au grand jour,
Sous l'écorce fleurant la sève des pins anoblie par l'abeille,
Je clame l'invisibilité des êtres de nature au grand jour.
Je veux, des ruisseaux et des rivières, des cathédrales de pierres,
Marier les cailloux sous l'usure de leurs flancs renversés, si las,
Qu'aux alluvions usées, l'Albarine a embrassé de son lit de terre,
Mouillées à la vague du lac de Bertâne que l'aile du cygne bat.
Je veux, sans aigreur, juste témoigner de son roulis de clocher,
Baptisant de pureté et de grâce sa verte pâleur cachée
Que truites et flots frayent d'amour à l'ombre des rochers,
Sous l’œil amoureux des myriades de sylphes amusés.
Quel fut mon plus grand abattement, si ce n'est l'éloignement,
Bien que me voyant en plaines, monts et combes, recouverte !
Aux heures des blessures réclamant l'Amour des gestes lents,
Là, toujours, me posant de repos de grandes enjambées vertes !
Que Bugey manque à mon cœur de verdure, sa grande messe !
J'ai de tous temps dessiné le retour aux cathédrales de marbre
Qui de leurs sentes vaporeuses appellent l'huile des grandes liesses,
Pour l'affinité des sons, et des parfums, qu’envoûtée, je suis l'arbre.
Nature, cathédrale et temple ! Colonnes de Mazières et ses marches !
Aux promontoires des villages que Lacoux adore d'un regard,
Que La Raggiaz pleure aux pas meurtris des longues marches,
Ô ! cathédrales de pierres sous la voûte des sapins verts, je pars.
Des ciels encilés*, que n'ai-je vécu pour vous d'heures longues,
Toute une vie, partie des cimes que pleure encore le cygne.
Me créant retour de poète prolixe, je vole d'ailes oblongues
À la Vierge noire esseulée de Longecombe ; je deviens le signe.
Je reviens, les pas désenlisés des neiges noires ourlées de rose
Que le bel enfant à la victoire suspendue aux lèvres fissurées
Dessine depuis des décennies. Oui ! je l'ai ma victoire si j'ose !
Cathédrales de pierres du Bugey ! Cathédrales d'arbres sculptées !
Rose est ta verdure. Blanche est ton nom à ton corps veillant.
Au temple de mes entrailles que vies saluent, je bâtis de pierres.
Blanche est ta forêt. Voile est la traîne de tes nuages volants.
Et me voilà à jouer sur ton orgue que tes branches ont soufflé, hier.
* mots création personnelle